La règle des 15 % à risque...

J’ai lu sur le site CareVox, dans un article du 25 mars dernier, que : « Les habitants de Californie vont se prononcer en novembre prochain sur une vraie légalisation du cannabis, qui dépasserait ainsi pour la première fois aux USA le cadre de l’usage thérapeutique. Si le texte est adopté, les Californiens pourraient fumer de la marijuana ou en cultiver à des fins personnelles, en toute légalité. Cette nouvelle étape intervient alors qu’en France Daniel Vaillant, maire du 18e arrondissement de Paris, a créé un groupe parlementaire sur la légalisation du cannabis. »

Le 9 octobre 2009, Daniel Vaillant, élu socialiste du XVIIIe arrondissement de Paris s’est déclaré favorable à une vente réglementée du cannabis.
«  Ne faudrait-il pas prendre le pari de légaliser la consommation personnelle de cannabis à travers un contrôle de la production et de l'importation, comme c'est le cas avec l'alcool ?"
"Depuis que je suis maire du XVIIIe arrondissement, aucun habitant n'est venu se plaindre des consommateurs de cannabis. Mais du crack, oui. Est-ce que le cannabis est dangereux ? Oui. Est-ce que ça touche la santé ? Bien sûr. Le sommeil, les réflexes en prennent un coup, la capacité à travailler, être éveillé, suivre des études, sûrement. Je ne joue pas l'ignorant, mais est-ce bien différent de l'alcool », explique t-il au Parisien.
Le 26 mars sur Le Post j’ai pu lire : « Le 26 février 2010 on apprenait que le maire du 18e arrondissement, Daniel Vaillant, a créé un groupe de travail parlementaire sur la légalisation du cannabis en France. Cela faisait suite à son annonce en octobre 2009 de vouloir la légalisation du cannabis. Aujourd'hui, le maire de Sevran, Stéphane Gatignon, à la suite d'une altercation musclée entre bandes rivales sous fond de trafic de drogue, insiste pour que l'on ouvre le débat sur la légalisation du cannabis. »

Drôle de substance que le cannabis. Elle séduit les jeunes de plus en plus tôt et inquiète les parents et les professionnels de la santé. Illicite, elle est cependant à la portée de tous et les adolescents la découvrent en moyenne à 15 ans. À noter que toutes les catégories sociales sont concernées, les quartiers chics comme les banlieues défavorisées. Il faut dire que l’offre ne manque pas : on estime qu’un adolescent se voit proposer un joint deux fois par mois, ce qui fait 24 fois par an. Il aura donc – estimation basse – 140 occasions de fumer pendant les années collège-lycée ! Comment, à l’âge de tous les possibles, résister à l’envie d’essayer, ne serait-ce qu’une fois, pour voir ? Cela semble si anodin, sans danger. La preuve, on s’en procure comme on veut, et le plus souvent auprès des amis ou de connaissances de ces derniers. Le shit est devenu un produit de proximité, au même titre que l’alcool. « Dès la classe de troisième, voire avant, ils fument à l’occasion, plutôt le samedi, lors d’une fête », affirme Daniel Marcelli, psychiatre.

J’avoue que ces lectures m’ont donné froid dans le dos. Pourtant, comme beaucoup, je ne trouve pas que les interdits soient la panacée dans ce genre de problème. La prohibition entraîne le marché noir, le goût de l’interdit entraîne une explosion de la consommation. Seulement voilà, moi j’ai été maman d’une jeune fille qui est tombée dans la drogue. Le petit pétard occasionnel est devenu quotidien et moi, je ne voyais rien (le célèbre ça n’arrive qu’aux autres, vous connaissez !). Quand j’ai découvert la situation, il était déjà trop tard ; elle était accro. J’ai pris peur, car je la voyais devenir différente : ces yeux dans le vague, elle ne s’intéressait plus à rien, devenait paranoïaque, s’enfermant dans une solitude qu’elle ne supportait pas mais qu’elle engendrait elle-même par ses comportements agressifs et changeants. Si vous avez déjà lu mes quelques écrits, vous savez qu’elle a mis fin à ses jours le 30 août 2005. Je vous entends déjà réagir, ce n’est pas un joint qui l’a mise dans cet état… Mon enfant souffrait d’un trouble du comportement qu’on appelle « Borderline ». Médicalement, effets et dangers du cannabis sont variables selon les individus et le mode de consommation. L'ivresse cannabique (euphorie, modifications sensorielles, relaxation, mais aussi baisse des réflexes, possibles nausées, vomissements) survient en général dans les 2 heures suivant la prise et dure quelques heures.

Cette ivresse peut aussi entraîner la décompensation aiguë d'une psychose, c'est-à-dire le déclenchement ou l'accentuation d'une pathologie psychiatrique lors de la prise de cannabis.

Le débat sur la légalisation du cannabis est ouvert depuis quelques années déjà. Il est de parti pris pour moi que de vous soumettre une interview (Nouvel Obs-février 2005) du docteur Xavier Pommereau, spécialiste des comportements à risque. J’ai tant lu sur ce sujet et je partage totalement l’analyse du Docteur Pommereau :

Le Nouvel Observateur. – Vous avez ouvert le centre Abadie en 1992. En douze ans, comment a évolué, chez vos jeunes patients, la consommation de cannabis ?

Xavier Pommereau.– « On a longtemps sous-estimé l’emprise du cannabis chez les adolescents. Mais depuis cinq ans c’est frappant : on est passé des années lycée aux années collège. Le nombre de consommateurs a augmenté, et ils sont de plus en plus jeunes. Cela vaut d’ailleurs pour tous les troubles du comportement : tentatives de suicide, scarifications, ivresses répétées, conduites dangereuses… » « Aujourd’hui, les ados n’arrivent pas à trouver leurs distances par rapport à leurs parents. Du coup, ils se sont inventé une nouvelle planète, la planète ado. Entre 8 ans et 25 ans, il y a des postures, des looks, des consommations – tabac, alcool, cannabis... – qui servent de rites de passage et disent : « Je suis ado. » Ça, ça n’a jamais existé auparavant. A coup de gel pour se mettre les cheveux en pétard, de paillettes, de mode gothique, ils se fabriquent un uniforme. A travers l’apparence, 85 % des ados arrivent globalement à prendre leurs marques – au sens propre comme au sens figuré – par rapport aux parents. Les autres, 15 %, s’en sortent mal parce qu’ils ont de bonnes raisons d’avoir des troubles de l’identité. »

N. O. – Lesquelles ?

X. Pommereau. – « Il y a la maladie mentale – psychose, schizophrénie, dépression grave... –, qui concerne 20 % de ces 15 %. »

N. O. – Existe-t-il des marqueurs du malaise adolescent ?

X. Pommereau. –« Le besoin d’agir dans la rupture de façon répétée, prononcée : « s’arracher » (partir), « se déchirer » (la tête), « se faire des frayeurs » (prendre des risques)... N’importe quel ado a envie de connaître ces expériences. Pour celui qui va bien, cela va lui donner un seuil. Il définira ses limites, et l’expérience lui servira de leçon. L’ado qui va mal cherche plus que cela et va plus loin. Il a besoin de rompre pour se sentir exister, pour ne plus souffrir, pour qu’on le reconnaisse »

Un débat aussi vaste ne se règle pas en quelques lignes mais vous parents, êtes-vous si sûrs que votre enfant ne fait pas partie de ces 15 % d’adolescents à risque ???

Vu sur carevox.fr