Ces traders, licenciés à Londres, qui reviennent en France toucher le chômage

No comment...

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10 Juin 2010 Par

 

Mathilde Mathieu

 

·         C'est l'épilogue d'une polémique née au plus fort de la crise financière, fin 2008: abasourdis, les Français avaient découvert que des traders installés à Londres depuis des années (avec des salaires mirobolants), brusquement licenciés, rentraient fissa dans l'Hexagone les uns après les autres, pour bénéficier d'allocations chômage de plusieurs milliers d'euros, sans jamais avoir cotisé un kopeck. Ces «petites mains» de la finance, plongés «dans le besoin», se rappelaient soudain l'intérêt du filet social français, tellement plus protecteur que les «Assedic» à l'anglaise...

Ces «revenants» savaient qu'il leur suffisait de travailler une journée (par exemple chez MacDo, où pullulent les micro-contrats), pour déclencher leur droit à indemnisation et toucher des sommes allant jusqu'à 6.400 euros par mois (pendant 2 ans). Restait à chiffrer ce phénomène, forcément exceptionnel, mais gênant...

Spécialiste du droit du travail, le député socialiste Alain Vidalies a donc questionné le ministère de l'économie dès février 2009; il vient tout juste de décrocher une réponse – encore partielle. Pour daigner communiquer leurs statistiques, les services de Christine Lagarde ont attendu que le parlementaire dégaine, le 25 mai, l'artillerie lourde, c'est-à-dire la procédure dite des «questions signalées», qui permet depuis 1994 aux députés d'exiger de n'importe quel ministre, dans un délai de 10 jours, des réponses circonstanciées à des interrogations d'ordre juridique ou financier. Alain Vidalies a précisément demandé à Christine Lagarde «de bien vouloir lui préciser, pour l'année 2009, le nombre de ces heureux bénéficiaires et le montant ainsi déboursé par l'Unedic».

Dans sa réponse (indiquée par l'élu à Mediapart), Bercy confirme d'abord l'existence du phénomène, après moult circonlocutions, en le relativisant: «La situation décrite, qui reste très marginale, ne constitue pas un cas de fraude mais s'apparente davantage à une optimisation du système de protection sociale applicable aux travailleurs migrants», estime le ministère. En fait, les traders «optimisent» une vieille réglementation européenne destinée à favoriser la mobilité des salariés au sein de l'Union.

Puis, dans un euphémisme, Bercy concède: «Il est exact que certaines personnes, ayant travaillé par exemple à Londres, peuvent revenir en France et percevoir une allocation beaucoup plus élevée que celle dont elles auraient bénéficié au Royaume-Uni.» Le «système» leur garantit soit 57,4% du salaire qui leur aurait été versé dans l'Hexagone pour un emploi équivalent, soit 37,3% de leur salaire perçu à l'étranger, avec un plafond fixé à 6.400 euros mensuels environ. Bercy ne le dit pas, mais compte tenu des salaires en cours à la City, ce plafond s'obtient aisément...

Après cette longue introduction, le ministère crache le morceau: «Depuis novembre 2008 (période correspondant au début de la crise financière et des licenciements dans la profession)», les «cas» recensés par Pôle emploi ont atteint le nombre de 33, dont 24 originaires de Grande-Bretagne.

S'ensuit une déception: Bercy «néglige» de répondre à Alain Vidalies sur le montant global déboursé pour assurer les allocations de ces trente-trois-là...  Le ministère préfère tenter de rassurer: «Alertés de cette réalité, les services chargés du contrôle de la recherche d'emploi sont (...) particulièrement vigilants à l'égard de cette catégorie de demandeurs d'emploi et n'hésitent pas à prendre une décision de sanction, le cas échéant, pour insuffisance de recherche d'emploi, lorsque leur retour en France n'est manifestement destiné qu'à bénéficier d'un revenu de remplacement sans accomplir d'actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi...»

Il faut espérer que ces allocataires d'un genre particulier retrouveront un job au plus vite. Si tel n'était pas le cas, ces trente-trois-là pourraient, dans l'absolu, coûter jusqu'à 5 millions d'euros à l'assurance-chômage (sur deux ans). Or, d'après les prévisions officielles tombées jeudi 10 juin, Pôle emploi a bien d'autres chats à fouetter: 151.000 «demandeurs d'emploi» supplémentaires (dans la catégorie «en recherche active») sont attendus en 2010...


Source : Mediapart

 

 


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