Affaire Bettencourt : les nouveaux enjeux de la saison 2

Vampires diaries, vous aussi ? Cela vous saoule ? C'est pas assez réaliste... J'ai ce qu'il vous faut en stock ! Il y des vampires, des loups-garous dévoués et serviles à tendances suicidaires (mais toujours CITOYENS), des accords dits « secrets » passionnant les gueux qui, d'habitude, constituent le repas principal et quotidien de cette vaste caste mondiale à grands coups d'ISF, de bouclier fiscal, de consommations de biens divers et variés, payés par leur sueur journalière, agrémentés d'autres joyeusetés directes ou indirectes. C'est donc, pour une fois, un tel soulagement d'observer cette tuerie fratricide mettant sur le devant de la scène les objectifs vénaux d'une attitude toute mamonique de certains acteurs serviles et bien intentionnés, faisant partie de cette bourgeoisie française bien éduquée, et tout aussi old school, à la froideur toute mathématique, qui entourent la 3e Femme la plus riche du monde...

Castes et « Élites » bien-pensantes internationales, rayonnantes !... Qui nous terrorisent et nous traumatisent jusque dans nos programmes TÉLÉS et s'octroient en plus le luxe d'afficher tout leur faste babylonien ! Et qui du reste, n'en déplaise à M. Besancenot, ne se limitent pas à Neuilly... C'est ainsi que ce matin, je remercie du fond du cœur, ENCORE UNE FOIS, Médiapart pour ce billet généreux sur les développements entourant l'affaire Bettencourt, ACTE 2..

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Fidèle à ma vocation de moine copiste, je m'empresse cependant de relayer ci-dessous leur discours. Attention, as usual... ça déménage.

Jusqu'ici cantonné à un rôle de l'ombre dans le tumulte des nombreux volets de l'affaire Bettencourt (familial, politico-financier, fiscal...), l'avocat Pascal Wilhelm est aujourd'hui le principal protagoniste des derniers rebondissements du dossier, comme jadis le photographe François-Marie Banier ou le gestionnaire de fortune Patrice de Maistre. Et ce n'est guère à son avantage.

Le rôle décisif de Me Wilhelm, nouvel avocat et «protecteur» de Liliane Bettencourt, dans l'apport par l'héritière du groupe L'Oréal de 143 millions d'euros au producteur Stéphane Courbit (voir nos révélations de lundi), vient de faire rebondir l'affaire sur un terrain à la fois judiciaire et, le concernant, disciplinaire, du fait de l'incroyable conflit d'intérêts dans lequel l'avocat se retrouve empêtré.

Pour saisir les nouveaux enjeux de l'affaire Bettencourt, saison 2, Mediapart fait le point sur un feuilleton qui, un an après sa révélation, n'en a manifestement pas fini de livrer des surprises.

- Avocat, mandataire, protecteur : l'équation impossible ?

Wilhelm.pngLa question est posée : peut-on être à la fois le «protecteur» d'une personne fragile et son mandataire en affaires ? C'est précisément le cas de Me Pascal Wilhelm. Non content d'être le principal avocat de Liliane Bettencourt après le départ de Georges Kiejman du dossier, il est aussi, depuis janvier, son «protecteur» au titre d'un mandat dit de «protection future». C'est-à-dire celui qui est censé assurer une sorte de tutelle de Mme Bettencourt si elle venait à être déclarée inapte par la médecine à gérer elle-même ses affaires.

La saisine cette semaine par Françoise Bettencourt-Meyers, la fille de la vieille dame milliardaire, de la juge des tutelles de Courbevoie vise précisément à clarifier ce point. «Françoise Meyers n'a pas demandé la mise sous tutelle, mais l'ouverture d'une instruction sur les conditions d'exécution du mandat de protection», précise-t-on ainsi dans l'entourage de Mme Meyers.

La juge de Courbevoie, qui avait officiellement constaté en début d'année l'altération des facultés intellectuelles de la milliardaire, va donc faire des investigations pour vérifier l'action de Pascal Wilhelm. En pratique, si son enquête devait aboutir à une mise en cause de Me Wilhelm, la magistrate pourrait révoquer l'avocat dans sa fonction de « protecteur » et lui interdire de plaider pour Liliane Bettencourt.
M. Wilhelm© Reuters   

Elle pourrait même transmettre le dossier au parquet – en l'occurrence celui de Paris, où l'avocat a son cabinet –, si elle juge que le protecteur a commis à son tour un «abus de faiblesse» ou un « abus de confiance » au préjudice de la propriétaire de L'Oréal dont il est, pourtant, censé protéger les intérêts.

Un embarrassant conflit d'intérêts

Ce qui complique la situation pour Pascal Wilhelm, c'est que, dans le cas de l'opération d'investissement de 143 millions d'euros issus de la fortune personnelle de Liliane Bettencourt au profit des activités du producteur Stéphane Courbit, l'avocat n'est pas seulement le conseil de l'héritière de L'Oréal. 

LB1.pngIl est aussi mandataire de deux autres parties directement concernées par la juteuse opération. Me Wilhelm est également l'avocat de Betclic, l'une des sociétés de Stéphane Courbit, le bénéficiaire de l'apport, et celui de Jean-Marie Messier, dont la banque a servi de conseil dans le cas présent.

Face à ce qui peut s'apparenter à un conflit d'intérêts manifeste, le bâtonnier de l'ordre des avocats, Jean Castelain, a logiquement décidé d'ouvrir une enquête déontologique sur son confrère. L'un de ses délégués, membre du conseil, devra lui rendre un rapport, après avoir entendu l'intéressé et les plaignants.

Ce rapport en main, le bâtonnier pourra classer l'affaire, prononcer une « admonestation paternelle » sans gravité ou, le cas échéant, ouvrir une procédure disciplinaire.

Mais l'affaire semble pour le moins mal emmanchée pour le protecteur de Liliane Bettencourt. Pour cause : «L'avocat ne peut être ni le conseil ni le représentant ou le défenseur de plus d'un client dans une même affaire s'il y a conflit entre les intérêts de ses clients», stipule bien le règlement intérieur national de la profession.

Pour sa défense dans le cas de l'opération Courbit, qui s'est conclue le 31 mai dernier, Pascal Wilhelm a indiqué, jeudi dans la presse, qu'il avait informé l'un des avocats de la fille Bettencourt et obtenu son accord par mail, en mars. «Dire que Françoise Bettencourt a donné son accord est sidérant», s'indigne pourtant un proche, côté fille.

«Pour qu'il y ait un réel problème, il faudrait que l'investissement soit défavorable, assure-t-on du côté de Me Wilhelm. Or la valorisation est très favorable pour elle. Les conditions des sorties sont exceptionnelles, le rendement est excellent.» L'octroi de 143 millions en question absorbe toutefois les disponibilités annuelles de Liliane Bettencourt – plafonnées à 150 millions – et l'a conduite par ailleurs à demander une rallonge de 30 millions d'euros.

Un accord mère-fille mis en pièces depuis longtemps

Un protocole d'accord, conclu le 6 décembre 2010 sous la forme d'un pacte secret a signé la grande réconciliation publique de Liliane Bettencourt et de sa fille après des mois de déchirement intimes. Ce protocole prévoyait le retrait de l'ensemble des plaintes des deux parties, de manière à éteindre l'incendie.

Ainsi, les plaintes contre François-Marie Banier, Patrice de Maistre, Fabrice Goguel ont été retirées par le camp de la fille. Sauf que celui de la mère n'a pas été aussi diligent. «Seule la plainte pour atteinte à la vie privée n'a pas été retirée, a expliqué Pascal Wilhelm au Figaro. Si elle ne l'a pas été, c'est que les enregistrements clandestins réalisés à son domicile (par l'ancien majordome de Mme Bettencourt) lui portent préjudice : cinq procédures se fondent sur ces écoutes... »

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© Reuters                                                                                                    

La réalité est différente. Claude Laplaud, le procureur de la République de Bordeaux, où les affaires Bettencourt sont désormais instruites, a confirmé, le 27 avril, dans un courrier que Mediapart a pu consulter, qu'il «disposait du seul désistement de Françoise Meyers concernant la procédure initiée contre François-Marie Banier».

«Ce désistement n'affecte donc pas les procédures ouvertes aux cabinets de Mmes Ramonatxo et Noel et M. Gentil des chefs de subornation de témoin et de vols, complicité, recel», a écrit le procureur à Me Antoine Gillot, l'avocat de Claire Thibout, l'ancienne comptable des Bettencourt à l'origine de révélations fracassantes sur un possible financement occulte de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, et du majordome Pascal Bonnefoy, auteur des enregistrements pirates. Mme Thibout et M. Bonnefoy sont réputés proches de la fille Bettencourt.

La procédure de trop

Lundi dernier, devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, le camp de la mère comme celui de la fille semblaient d'accord pour faire table rase des enregistrements clandestins du maître d'hôtel dont la révélation par Mediapart, en juin 2010, a lancé l'affaire Bettencourt.

Côté Françoise Meyers, on plaidait la nullité (intégrale) de la procédure : le procureur de Nanterre, Philippe Courroye, qui a initialement hérité du dossier, ne pouvait pas, comme il l'a fait, ouvrir d'enquête préliminaire pour «atteinte à la vie privée» sans plainte préalable d'une victime.

Les avocats de la mère par contre ont défendu une Question prioritaire de Constitutionnalité (QPC) pour soulever la contradiction entre l'article 427 du Code de procédure pénale qui établit la liberté de la preuve en matière pénale - et accepte l'enregistrement - et le principe constitutionnel de respect de la vie privée.

Ce faisant, ils relançaient la polémique sur le fond, tout en ouvrant un nouveau délai en cas de transmission de la QPC à la cour, et, le cas échéant, au Conseil constitutionnel. «Ils renvoient aux calendes grecques la question du retrait de leurs plaintes, commente le camp de la fille. La QPC est la preuve qu'ils ne voulaient pas appliquer les accords».

Sarkozy, Woerth et les espèces...

Ces nouveaux rebondissements ne doivent pas, pour autant, faire oublier le volet le plus sensible de l'affaire Bettencourt : le politique. Celui qui concerne Nicolas Sarkozy et un ancien ministre phare du gouvernement, Eric Woerth.

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Depuis plusieurs mois, trois juges de Bordeaux enquêtent, d'une part, sur un éventuel trafic d'influence imputable à M. Woerth et, d'autre part, sur des soupçons de financement politique occulte s'agissant de la campagne présidentielle de 2007. Les investigations, qui ont déjà donné lieu à des perquisitions (à l'UMP ou chez Eric Woerth, par exemple), se déroulent dans la plus grande discrétion.

Dans le premier cas, la justice tente de tirer au clair les conditions d'embauche, fin 2007, de la femme d'Eric Woerth au sein de la société gestionnaire de la fortune de Mme Bettencourt et de la remise, quelques semaines plus tard, en janvier 2008, d'une Légion d'honneur à l'employeur direct de Mme Woerth (Patrice de Maistre) des mains mêmes de son ministre de mari.

Dans le second cas, il y a d'abord eu les déclarations de l'ancienne comptable du couple milliardaire, Claire Thibout, à propos d'un versement illicite de 150.000 euros au profit de la campagne électorale de M. Sarkozy en 2007. A défaut d'être formellement établies – les versements d'espèces sont généralement improuvables et c'est même leur intérêt premier –, les affirmations de l'ex-comptable étaient déjà confortées par plusieurs éléments avant même que les juges de Bordeaux n'héritent du dossier en novembre dernier.

Dans ses déclarations à la juge de Nanterre Isabelle Prévost-Desprez (en juillet 2010), Claire Thibout avait ainsi indiqué que c'est le 18 janvier 2007 qu'elle avait remis une partie de l'argent (50.000 euros en espèces) destiné à financer les ambitions présidentielles de Nicolas Sarkozy au gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre.

Or, dans l'agenda de l'ex-comptable, figure à la date indiquée la mention suivante : «Rendez-vous madame Bettencourt pour donner enveloppe qui donnera à Patrice». Et à la date du lendemain, le 19 janvier, on peut lire ceci : «Patrice et trésorier». A savoir, un rendez-vous entre Patrice de Maistre, l'homme de confiance de la milliardaire, et Eric Woerth, trésorier de la campagne de M. Sarkozy.

Les agendas de Patrice de Maistre saisis par la police confirment l'existence d'une rencontre dans la matinée du 19 janvier avec Eric Woerth, pour un «café». Une enveloppe a-t-elle bien été remise ce jour-là ? MM. Woerth et de Maistre s'en défendent l'un et l'autre.

Les livrets de comptabilité de la maison Bettencourt, renseignés par Claire Thibout pendant ses treize années d'activité au service de la propriétaire de L'Oréal, attestent pour leur part, qu'entre la fin 2006 et le début de l'année 2007, de fortes sommes d'argent ont été retirées en espèces sans justification (contrairement à toutes les dépenses courantes) depuis les comptes des Bettencourt. D'après l'ex-comptable, une partie de ces sommes avait précisément vocation à financer de la main à la main des hommes politiques français.

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© DR                                                                                                                        

A ces éléments, qui donnent du crédit à la parole de l'ancienne comptable, il faut ajouter la découverte par les enquêteurs de la brigade financière des journaux intimes du photographe François-Marie Banier. Le protégé de Liliane Bettencourt y notait certains événements dont il était le témoin, les confidences dont il était le destinataire, au téléphone ou dans l'hôtel particulier de la milliardaire, à Neuilly-sur-Seine.

Il s'avère que dans l'un de ses carnets, M. Banier a notamment reporté, au printemps 2007, des«propos tenus» par la propriétaire de L'Oréal selon lesquels Nicolas Sarkozy aurait reçu, en pleine campagne présidentielle, de l'argent des époux Bettencourt. La phrase exacte : «De Maistre me dit que Sarkozy demande encore de l'argent. Si je dis oui, comment être sûre qu'il lui donne bien ?»

Par deux fois, ces dernières semaines, le juge Jean-Michel Gentil a convoqué comme témoin Mme Bettencourt pour lui poser des questions dans ce volet du dossier. Mais, par deux fois, la vieille dame milliardaire a fait valoir un mauvais état de santé pour ne pas répondre aux convocations du juge. 

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