Affaire Bettencourt : et le juge Gentil était toujours vivant !

YES ! Comme quoi on va de surprise en surprise ! Et je ne suis pas peu fier de voir que certain(e)s de nos juges ne sont pas impressionnés par les puissances de l’argent et les beaux costumes… ; ))) Bravo !

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Nicolas Sarkozy et Eric Woerh

Les avocats de Nicolas Sarkozy et d’Eric Woerth auront tout essayé pour discréditer les juges bordelais et leur enquête. Que craignent-ils pour déployer une telle énergie ?

Caramba ! Encore raté ! Dans le dossier Bettencourt, les avocats de Nicolas Sarkozy et d’Eric Woerth ont encore échoué à dégommer les trois juges d’instruction en charge de cette affaire de famille autant que d’Etat.

Saisie de motifs de nullité de la fameuse expertise médicale diligentée par le juge Gentil et réalisée le 7 juin 2011 sur la personne de Liliane Bettencourt, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bordeaux a annoncé qu’elle rendrait son arrêt le 24 septembre.

Mais l’avocat général Pierre Nalbert, représentant du Parquet, a d’ores et déjà affirmé que cet examen médical - qui fait remonter la vulnérabilité de l’héritière L’Oréal à septembre 2006 et qui fonde, donc, la plupart des mises en examen pour abus de faiblesse dans ce dossier, dont celle de Nicolas Sarkozy - était juridiquement valable. Il a même estimé que si les magistrats instructeurs étaient « passés en force » pour réaliser cette expertise, pareille décision était justifiée par l’urgence et la difficulté de faire procéder à un examen médical de la milliardaire.

Autrement dit, pour le parquet – et sans préjuger de la décision que rendra la chambre de l’instruction - tous les arguments soulevés par les avocats des douze personnes mises en examen dans ce dossier tentaculaire méritent d’être balayés.

Ce n’est pourtant pas faute d’avoir tout essayé pour discréditer les juges bordelais et leur enquête. Les avocats de Nicolas Sarkozy et d’Eric Woerth, entre autres, ont d’abord mis en cause la probité du juge Jean-Michel Gentil et de l’experte Sophie Gromb, au motif que cette dernière avait été le témoin de mariage de l’épouse du juge, la procureure Isabelle Raynaud, le 30 juin 2007 à Mérignac.

Puis, ils ont laissé entendre que ce médecin, chef du service de médecine légale du CHU de Bordeaux, reconnue pour ses compétences par l’ensemble de ses collègues, aurait bénéficié d’une majoration indue de ses honoraires – ce qui s’est, par la suite, révélé mensonger. A l’audience, Me Thierry Herzog, avocat de Nicolas Sarkozy, a même suggéré que le juge Gentil aurait usé de « manœuvres frauduleuses » pour désigner les experts qui l’arrangeaient.

Qu’importe que l’instruction soit dirigée par trois juges (Jean-Michel Gentil, Valérie Noël et Cécile Ramonatxo) et non un seul, qu’importe que l’expertise ait été menée par cinq médecins et non un, ces éléments de vie privée prouveraient, aux yeux des défenseurs de Nicolas Sarkozy, que l’enquête ne répondait pas à la probité requise dans ce genre de procédure. Sauf que ce n’est pas du tout l’avis du parquet – le même parquet qui a pourtant requis un non-lieu pour Nicolas Sarkozy et Eric Woerth.

A ce jour, d’ailleurs, personne n’a songé à s’interroger pour savoir comment les défenseurs de l’ancien chef de l’Etat et de l’ex-ministre du Budget avaient pu obtenir ce genre d’informations sur la vie privée du juge. Qui a enquêté ainsi – et en mobilisant quels moyens ? – pour découvrir les noms des témoins de mariage d’un magistrat ? Peut-être la question sera-t-elle évoquée, un jour, à la barre d’un tribunal…

En attendant, le report de la décision de la chambre de l’instruction de la cour d’appel au 24 septembre pose un sérieux problème aux avocats de Nicolas Sarkozy. En effet, à partir du 29 juillet, les juges d’instruction peuvent, sans attendre cet arrêt, rendre leur ordonnance de règlement et, donc, décider de qui, dans l’affaire Bettencourt, bénéficie d’un non-lieu et de qui est renvoyé devant un tribunal pour être jugé. Du coup, les avocats de tous les mis en examen ont déposé une demande de suspension de l’instruction devant le président de la chambre de l’instruction qui devrait répondre dans les tous prochains jours.

Mais quelle que soit sa réponse, la guérilla judiciaire ne s’arrêtera pas là. Le mot « guérilla » est d’ailleurs sans doute trop faible. L’AFP, d’ordinaire moins lyrique, s’est même autorisée, la veille de l’audience, à titrer une de ses dépêches : « Bettencourt : la défense largue un tapis de bombes sur l’enquête ». Un tapis de bombes… Le genre d’expression que les reporters de guerre utilisaient naguère pour décrire les combats au Vietnam et, notamment, l’utilisation de napalm !

Les avocats peuvent encore formuler une demande de récusation du juge auprès de la première présidente de la cour d’appel de Bordeaux. Certains envisagent même le dépôt d’une plainte pour faux en écriture publique contre le juge Gentil. Une offensive procédurière qui rappelle évidemment la campagne de dénigrement lancée, dès l’été 2010, contre la juge de Nanterre Isabelle Prévost-Desprez, alors en charge de l’enquête. Campagne réussie, puisqu’au terme d’une procédure contestée et contestable, celle-ci avait été dessaisie du dossier Bettencourt. L’instruction avait alors été dépaysée à Bordeaux.

Aujourd’hui, c’est le juge de Bordeaux qu’on tente d’abattre. Et avec quelle constance ! Tous les moyens sont visiblement permis. On a d’abord laissé entendre que le simple fait que le juge soit marié à une procureure pouvait jeter la suspicion sur l’indépendance de son travail. Rumeur malveillante, très vite démontée.

Puis, arguant que Jean-Michel Gentil avait été président de l'association des magistrats instructeurs, certains ont voulu faire croire qu’il était forcément de gauche, donc engagé dans un combat politique contre Sarkozy.

Son avocat, Me Thierry Herzog, a ensuite cru bon de moquer les « erreurs » factuelles de l’enquête menée par le juge. Le magistrat - c’était écrit dans le Journal du Dimanche et l’information avait été reprise par tous les médias audiovisuels - aurait confondu Liliane Bettencourt et Ingrid Betancourt en analysant les rendez-vous inscrits à l’agenda de Nicolas Sarkozy. Un mensonge tellement gros que le parquet de Bordeaux dut se fendre d’un communiqué pour indiquer : « contrairement à ce qui a pu être publié dans divers organes de presse à propos d'une confusion entre Mme Ingrid Betancourt et Mme Liliane Bettencourt, la convocation de M. Nicolas Sarkozy ne mentionnait pas un rendez-vous relatif à Mme Ingrid Betancourt, figurant dans son agenda à la date du 5 juin 2007 au palais de l'Élysée, et qu'il n'a pas été interrogé sur ce point ».

Le Figaro a ensuite opportunément ressortie une tribune publiée dans le journal Le Monde datée du 27 juin 2012 dans laquelle 82 magistrats – dont le juge Gentil – s'alarmaient de l'abandon de la lutte contre la grande délinquance financière. Le nom de Nicolas Sarkozy n’était jamais cité dans le texte, mais il n’en fallait pas plus pour Le Figaro et les amis de Nicolas Sarkozy pour conclure que l’ancien président de la République était dans le collimateur d’un véritable juge « rouge ». Un magistrat aux visées politiques qui n’avait d’autre but que de « se faire » l’ancien chef de l’Etat. Pas seulement incompétent donc, mais aussi militant.

Et l’on passe sur les attaques au vitriol que les amis de l’ancien chef de l’Etat ont cru bon de déclencher contre le magistrat. A commencer par Henri Guaino qui l’accusa carrément de déshonorer « un homme, les institutions, la justice. »

Mais pour l’heure, comme le célèbre canard de Robert Lamoureux, le juge Gentil était toujours vivant…
 
 
Source : Marianne.net
 
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