
PARIS (Reuters) - Air France a annoncé jeudi un projet de réduction d'effectifs de 5.122 personnes d'ici décembre 2013 dans le cadre de son plan d'économies de deux milliards d'euros, afin de réduire sa dette d'autant et de renouer durablement avec les bénéfices.
Le chiffrage des sureffectifs de la branche française d'Air France-KLM, le numéro deux européen du transport aérien, correspond aux évaluations qui circulaient en interne, mais porte sur un calendrier plus resserré que prévu, le plan courant jusqu'à fin 2014, afin de parer aux incertitudes économiques.
La compagnie s'est engagée jeudi à ne procéder à aucun licenciement sec d'ici la fin de l'année prochaine, voire en 2014 si elle constate au second semestre 2013 que le plan se déroule comme prévu.
Mais cette promesse ne répond qu'en partie aux demandes des syndicats qui réclament qu'elle s'applique pendant toute la durée du plan.
"Ils nous demandent de nous engager jusqu'à fin 2014 et eux ne s'engagent que jusqu'à fin 2013, il y a quelque chose qui ne va pas là-dedans", a estimé Philippe Chassonnery, secrétaire général de Force ouvrière à Air France.
Pour David Ricatte, secrétaire général national de la CGT d'Air France, premier syndicat du groupe, "Air France édicte ses règles du jeu et se permet de les revoir en cours de route. Ça prouve qu'ils n'ont pas confiance dans leur propre plan. On ne marchera pas dans la combine."
"LA VIE CONTINUE"
Air France veut réduire ses coûts de 20% d'ici fin 2014, soit 1,8 milliard d'euros d'économies. La moitié devrait provenir des réductions d'effectifs, qui seront discutées avec les syndicats lors d'un nouveau comité central d'entreprise le 28 juin.
Ce jour-là ouvrira le nouveau satellite S4 de l'aéroport de Roissy, doté de boutiques de luxe et dans lequel Air France disposera d'un salon haut de gamme destiné à séduire sa clientèle affaires.
"C'est un élément essentiel de la compétitivité. J'en suis d'autant plus content que ce matin, j'ai dû annoncer (...) des économies et des sureffectifs dans des conditions très douloureuses et difficiles", a déclaré Alexandre de Juniac, PDG d'Air France, devant un parterre d'invités.
"Mais la vie ne s'arrête pas, au contraire, elle commence, elle continue avec des investissements au sol et en vol".
La direction a rappelé que les départs contraints ne pourraient pas être évités si des accords n'étaient pas signés début juillet. Elle ajoute que les réductions d'effectifs seraient plus élevées car liées à une baisse d'activité et à une réduction forcée du périmètre industriel d'Air France.
"En préalable à tout accord, on veut l'assurance qu'il n'y aura pas de licenciement sec jusqu'en 2015, sauf événement majeur", a prévenu Béatrice Lestic, secrétaire général de la section CDFT d'Air France. "L'atmosphère est lourde. On est un peu assommés par le chiffrage."
Un échec des discussions pourrait déboucher sur un conflit social au moment des grands départs en vacances et empêcher une remontée du cours en Bourse d'Air France-KLM, les marchés attendant beaucoup de l'issue des négociations.
L'action Air France-KLM a d'ailleurs bondi de 5,49% à 3,6290 euros jeudi, affichant la plus forte hausse du SRD. A ce cours, le groupe est valorisé un peu moins de 1,1 milliard d'euros.
L'Etat français, qui détient 15,9% d'Air France-KLM, surveille de près l'avancée des négociations.
"Il faut s'adapter et s'adapter dans le dialogue", a déclaré le ministre du Travail Michel Sapin sur Europe 1.
UN INVESTISSEUR PUBLIC POUR LE PÔLE RÉGIONAL?
Sur un total de 49.301 salariés d'Air France sous contrat français, 1.712 départs naturels (à la retraite) ne seront pas remplacés, les sureffectifs étant évalués à 3.140 personnes.
Ces sureffectifs se répartissent équitablement entre les personnels au sol (2.056 personnes) et les hôtesses et stewards (904 personnes).
Pour les pilotes, Air France chiffre le sureffectif à 212 personnes. Ce chiffre s'ajoute aux 238 déjà identifiés fin 2011, la compagnie ayant toujours besoin d'un volet de pilotes disponibles pour parer aux variations du trafic.
Pour cette raison, les pilotes ne devraient pas être concernés par les départs volontaires, contrairement aux autres catégories de personnel.
Le Syndicat national des pilotes de lignes (SNPL) d'Air France juge dans un communiqué "injustifiée" l'exclusion des pilotes de ce dispositif.
Air France, dont l'activité court et moyen-courrier a perdu quelque 500 millions d'euros en 2011, prévoit de créer un pôle régional regroupant trois compagnies existantes, Régional, Brit Air et Airlinair.
Alexandre de Juniac a précisé que le pôle régional aurait besoin de moyens pour adopter une politique commerciale "agressive" et rationaliser sa flotte.
"Si un investisseur venait en partenaire avec nous (...) notamment un investisseur public, pour soulager Air France pour la partie de dépenses en capital, compte tenu de la situation financière d'Air France, ce serait plutôt une bonne nouvelle", a-t-il dit, en ajoutant que ce n'était pas "obligatoire".
Avec Benjamin Mallet et James Regan, édité par Marc Angrand
par Cyril Altmeyer
Source : Reuters
Informations complémentaires :