Au Costa Rica, 98,7 % de l’électricité produite est « verte »

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Et il y a d'autres alternatives aux énergies fossiles, et certains ne s'y sont pas trompés.... (informations complémentaires).
 
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La ferme solaire Miravalles, au Costa Rica. RODRIGO ARANGUA/AFP

À 2400 mètres d’altitude sur la cime du Montecristo, au nord-ouest du Costa Rica, des dizaines d’éoliennes fendent l’air dans un bourdonnement lancinant. En contrebas, le lac d’Arenal s’étend à l’infini dans la vallée. Au loin, trois volcans trônent au milieu d’une végétation luxuriante. Cet écrin de nature est au cœur du mix énergétique propre de ce petit pays de cinq millions d’habitants qui rêve de devenir la première nation neutre en CO2 à l’horizon 2021.

« De janvier à octobre, nous avons produit 98,7 % de notre électricité à partir d’énergies renouvelables », se félicite Elbert Duran, directeur de la communication de l’Institut costaricain d’électricité (ICE).

L’année prochaine, le pays prévoit d’atteindre 100 % d’électricité verte. Au volant de son 4×4 (pas électrique, lui), M. Duran longe lac et le barrage Arenal. Avec une capacité de stockage de 2,5 milliards de mètres cubes, c’est la plus grande réserve d’eau artificielle d’Amérique centrale. La route est sinueuse. Les forêts et les pâturages déclinent toute la palette des verts.

Diversifier la production d’énergies propres

Plus bas, trois usines hydroélectriques, construites en cascade sur 1500 mètres de dénivelé, totalisent une capacité de plus de 360 mégawatts (MW). « L’hydraulique est la première source d’électricité du pays, situé dans une zone tropicale très pluvieuse, commente M. Duran. Mais le réchauffement climatique et le phénomène météorologique d’El Niño menacent la régularité des pluies. Pour éviter de recourir aux combustibles fossiles polluants, l’ICE a dû diversifier sa production d’énergies propres. »

Le 4×4 traverse la ville de Tilaran, dont le nom vient du mot tilawa, qui signifie en langue indienne, « le lieu de la pluie et du vent ». Dans les hauteurs, les bourrasques atteignent plus de 100 km/h. « Dès les années 1980, le pays a été pionnier en Amérique latine dans la recherche en énergie éolienne. » Le Costa Rica compte neuf parcs éoliens et prévoit d’en construire huit autres d’ici à 2017. Le vent est la troisième source d’énergie électrique, après la vapeur des entrailles de la terre.

À 70 km au nord-ouest de Tilaran, d’énormes colonnes de fumée blanche s’échappent des cinq usines du champ géothermique de Miravalles, disséminées sur les flancs boisés du volcan éponyme. Une légère odeur de soufre plane sur cet immense site de 42 km de tuyaux qui relient les turbines aux 25 puits de production, forés à plus de 1 600 mètres de profondeur. « L’eau chaude et la vapeur génèrent 163,5 MW d’électricité », commente Eddy Sanchez, directeur du centre de ressources géothermiques de l’ICE.

Juste à côté de l’usine Miravalles III, 4300 panneaux photovoltaïques scintillent au soleil. Sur 22.000 m2, leur capacité est de 1 MW. « Cette usine expérimentale nous a été offerte par le gouvernement japonais », souligne M. Sanchez. Solaire, hydraulique, éolien, géothermie… Les centrales sont toutes reliées au Centre de contrôle de l’énergie (Cence), situé à San José, la capitale.

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Défi de poids

Ce lieu stratégique gère le réseau électrique national. Face à des écrans géants, son directeur, Salvador Lopez, joue aux chefs d’orchestre. « Il s’agit de combiner nos différentes sources d’énergies propres pour assurer la stabilité du système sans utiliser de combustibles fossiles. » Le mix énergétique de l’ICE est de plus en plus vert. Les centrales thermiques fournissaient en 2014, 10,4 % des besoins électriques du pays. Elles n’en fourniront plus aucun en 2016 à condition que l’ICE remporte son pari.

Un défi de poids lors de la saison sèche : « L’eau, le soleil et le vent sont des ressources instables qui varient selon la météo. Avec plus de 100 volcans, dont cinq en activité, la géothermie représente une option bien plus stable », explique M. Lopez. L’ICE a lancé le projet d’une septième centrale géothermique, prévue en 2019 sur les flancs du volcan Rincon de la Vieja, au nord-ouest du pays. Le potentiel géothermique du pays n’en reste pas moins limité à 850 mégawatts, selon l’ICE. Sans compter que le coût de l’électricité produite à partir d’énergies renouvelables revient encore bien plus cher qu’à partir des combustibles fossiles.

Politiques avant-gardistes

Pour Gilberto de La Cruz, directeur de la planification, au siège de l’ICE à San José, « notre succès écologique est le résultat de politiques avant-gardistes mises en place bien avant que le changement climatique devienne une préoccupation mondiale ». En 1949, le président José Figueres Ferrer a créé l’ICE en nationalisant la production et la distribution de l’électricité. Un an plus tôt, celui que les Costaricains surnomment affectueusement Don Pepe, démilitarisait le pays, au bénéfice de l’éducation et du système de sécurité sociale. Ce choix vaudra au Costa Rica son surnom de « Suisse d’Amérique latine ». « Un pays où la population est informée et consciente des enjeux environnementaux », souligne M. de La Cruz.

Dans les années 1990, des lois ont ouvert le marché de l’électricité aux entreprises privées. « Leur participation se limite à 30 % de la capacité de production sur un marché qui reste régulé par l’ICE, à la tête d’un quasi-monopole », détaille-t-il. Bilan : 99,4 % des foyers sont connectés au réseau national. « Le pays affiche la meilleure couverture électrique d’Amérique latine avec l’Uruguay », revendique M. de La Cruz.

Difficile équilibre entre électricité verte et respect de l’environnement

De quoi permettre au pays de bientôt devenir neutre en émission de carbone ? « Loin de là, déplore Monica Araya, dirigeante de Nivela, centre d’études sur le changement climatique. Électricité propre ne signifie pas mix énergétique propre. L’électricité ne représente qu’un quart de la consommation énergétique du pays. Le reste provient des combustibles fossiles polluants. Les transports consomment près de 60 % de l’énergie produite. » De 1980 à 2013, la flotte automobile est passée de 180 000 à 1,3 million de véhicules. En fin d’après-midi, des embouteillages monstres se forment dans les rues de San José. « Les transports publics sont déplorables », peste Mme Araya. Pour redresser la barre, le gouvernement mise sur un projet de construction d’un train électrique dans la zone métropolitaine de San José.

Lire aussi : COP21 : « Le Costa Rica sera “le premier pays neutre”en carbone d’ici à 2021 »

Sans compter un programme de développement énergétique, dans lequel l’hydraulique se taille la part du lion. A une centaine de kilomètres à l’est de la capitale, le plus grand chantier d’Amérique centrale, après ceux des canaux de Panama et de Nicaragua, se dresse au milieu de la jungle. La future centrale hydraulique de Reventazon, dans la province de Limon, a mobilisé 4000 ouvriers dans une chaleur étouffante pour construire un barrage de 130 mètres de haut et un réservoir de 118 millions de m3 d’eau. La première de ses quatre turbines devraient être lancée en mars 2016.

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La future centrale hydraulique de Reventazon, dans la province de Limon, a mobilisé 4000 ouvriers
dans une chaleur étouffante pour construire un barrage de 130 mètres de haut et un réservoir de 118
millions de mètres cubes d’eau. MARCO SIBAJA/AFP

« Les investisseurs internationaux, dont la Banque mondiale, ont mis 1,4 milliard de dollars sur la table pour réaliser cette centrale de 306 MW qui alimentera 525.000 foyers en électricité », détaille Luis Allan Retana. Responsable de la gestion environnementale du site, il occupe un poste stratégique au sein de l’ICE. « Nous avons déplacé 10.000 plantes et 174.000 animaux dans la zone du réservoir pour minimiser l’impact environnemental de l’ouvrage sur la flore et faune », explique M. Allan Retana. Un périmètre de protection du jaguar a notamment été défini pour préserver le couloir migratoire de ce félin qui traverse les deux cordillères entourant le barrage.

L’enjeu est de taille dans un pays, où les zones naturelles protégées englobent 25 % du territoire. Le difficile équilibre entre électricité verte et respect de l’environnement menace un autre projet hydraulique encore plus grand. « Evaluée à deux milliards de dollars, la future centrale d’El Diquis, dans le sud du pays, aura une puissance de 650 MW en 2025, soit le double de l’usine de Reventazon, explique M. de La Cruz. Mais le chantier provoque l’opposition des populations indiennes de la région, qui devront être consultées avant de lancer les premiers bulldozers. En cas de refus, le pays devra sans doute importer du gaz naturel liquide pour répondre à ses besoins croissants. » Une décision qui pourrait remettre en cause la promesse de neutralité carbone que le pays compte promouvoir lors de la conférence mondiale sur le climat (COP21), qui se tiendra à Paris en décembre.

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