Claire, 37 ans, 2839 euros par mois : des crédits et jamais un sou de côté

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J'ai choisi cet article, car il met le point sur un détail délicat. Comme on vous l'a expliqué, les salaires ne tiennent pas compte des dépenses énergétiques et alimentaires (ou alors de façon irréaliste), aussi nous n'avons tout simplement pas assez de salaire pour faire face aux dépenses mensuelles courantes.

D'après ce que l'on avait vu, il manque environ 20%. D'ailleurs, on voit bien que cette femme est obligée d'avoir recourt à des crédits dès qu'elle veut s'éloigner de la ligne.

Et là ... c'est le piège...

Nous, on est tombé dedans, on avait 25 ans... Cela c'est fini en surendettement, et croyez-moi, on a bien, bien, bien compris la leçon...

De plus, cette personne vit seule, et sous loue son appartement (ce qui est illégal), elle n'as pas de voiture et ne fume pas (essayez honnêtement de compter votre poste dépense cigarette mensuel, si c'est comme moi vous serez surpris...)

Le plus grand drame dans tout cela, c'est qu'à mon humble avis, les gens qui nous gouvernent (la caste du dessus), n'a AUCUNE idée de la réalité de millions de Français (car eux ont des salaires très confortables ... ou vivent de leurs rentes). Alors ils font semblant d'ignorer la situation, parce que cela les arrange bien...

Mais ça ne durera qu'un temps, car les prix et les services vont continuer à monter... Et d'après ce que je vois, ce n'est pas prêt d'être le cas des rémunérations... (Au contraire si l'on prend en compte ce qui se passe en Grèce, et le fait que Goldman Sachs, il y a un an, voulait DÉJÀ baisser de 30% tous les salaires en France).

D'ailleurs, rappelez-vous que le salaire moyen des non cadres en France est en moyenne de 1541 € brut par mois... Pourtant ils ont +/- les mêmes charges....

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Claire dans la rue à Paris, le 10 octobre 2014 (Emilie Brouze/Rue89)

Depuis qu’elle travaille, la fonctionnaire a toujours des crédits à la consommation en cours, qui lui permettent de vivre un peu au-dessus de ses moyens. Claire a ouvert son porte-monnaie à Rue89.

Quand elle ne comptait pas, Claire (un pseudo), 37 ans, pouvait en fin de mois claquer 200 euros dans un manteau pour un coup de blues. Ou régler une paire de chaussures en trois fois parce qu’il ne lui restait pas assez pour les acheter. Les crédits à la consommation financent encore la plupart de ses voyages, comme les trois semaines à Bali, l’été dernier.

La fonctionnaire qui touche 2 524 euros par mois répète qu’elle n’a jamais su mettre un sou de côté :

« Je gagne ma vie surtout pour me faire plaisir. J’ai de l’admiration pour les gens qui économisent : je n’ai jamais eu cette patience-là. »

En charge des projets web dans une mairie de banlieue parisienne, Claire est une jolie femme, brune aux yeux clair, plutôt coquette et enthousiaste. La trentenaire nous a écrit pour proposer d’ouvrir son porte-monnaie parce que la rubrique, explique-t-elle, lui a donné envie de compter. Depuis le début de l’année, elle s’efforce de faire plus attention et de compiler toutes ses dépenses dans des colonnes.

Si Claire s’est toujours débrouillée pour payer ses factures elle a, par le passé, très souvent été à découvert. Depuis qu’elle a commencé à gagner sa vie, la fonctionnaire vit avec des crédits à la consommation. Un seul à la fois : quelques semaines avant d’en terminer un, elle le rachète pour en contracter un autre.

Avant qu’elle lise les petites lignes de ses contrats et prenne peur, Claire était passé par des organismes de crédit type Cofidis (« J’appelais, ils me donnaient 1000 euros »). Sa banque, la BNP, auprès de qui elle emprunte habituellement, ne lui a jamais refusé un prêt.

Des petites sommes par-ci, par-là, jamais plus de 7000 euros – le montant emprunté en juillet dernier.

C’est sans fin et ça ne l’angoisse absolument pas.

Dans la culture, au smic

« Peur de quoi ? », relève-t-elle. Claire fait remarquer qu’elle a la sécurité de l’emploi et la trentenaire n’a jamais été inquiète de se retrouver au chômage. Etudiante, elle touchait une bourse et cumulait les boulots qu’elle pouvait décrocher en trois jours dans des boîtes d’intérim. Il lui arrivait de travailler un week-end en plus pour régler une facture de téléphone trop élevée à cause d’un amoureux à l’étranger.

Après ses études à Paris, fin 1999, Claire a débuté dans le secteur de la culture, au smic :

« Mon niveau de vie a dégringolé. C’était une période difficile. J’avais l’impression de gagner ma vie juste pour le loyer et la bouffe, je ne pouvais pas me permettre d’être à découvert. »

Alors elle a passé le concours d’enseignant, décroché en 2003. Premier salaire : 1700 euros par mois et un « manque flagrant de reconnaissance ». Au bout de quatre ans, Claire a une opportunité dans la mairie de gauche où elle travaille actuellement, et obtient son détachement – elle a depuis intégré la fonction publique territoriale.

Sa situation est bien plus confortable, malgré le gel du point d’indice des fonctionnaires. Son travail, « très nourrissant », évolue et lui plaît beaucoup.

Claire se sent « privilégiée » au sein de la fonction publique territoriale : les agents de catégorie A comme elle ne représentent que 8% des effectifs, contre 75% pour la catégorie C. La chargée de projets web se situe sans hésitation dans la classe moyenne. « Les gens qui gagnent beaucoup d’argent, je les fréquente assez peu », remarque-t-elle.

« Je n’ai pas des envies de riches »

Fille unique, Claire a conservé très peu de liens avec son père, un artiste qui a grandi dans un milieu aisé. Quand elle y réfléchit, elle pense que son incapacité à faire des économies tient en partie de ses parents. Ouvrir un PEL (Plan épargne logement), devenir proprio ne fait pas partie de son « schéma mental » :

« Je ne viens pas d’un milieu bourgeois ou fortuné. Quand je suis en vacances, j’ai l’impression d’avoir une carte bancaire illimitée mais je n’ai pas des envies de riches, mes dépenses restent basiques. »

La trentenaire n’a jamais eu de gros problèmes de sous, contrairement à sa mère, 65 ans, infirmière à la retraite, qui fait encore des ménages pour éponger ses dettes :

« Elle avait peut-être un vice caché... Je ne sais pas dans quoi son salaire partait, on ne parle pas trop d’argent. »

En soustrayant ses dépenses de ses revenus, tout en bas de son porte-monnaie, le compte n’y est pas : la fonctionnaire dépense un peu plus qu’elle gagne. L’argent de son dernier crédit lui permet de combler la différence.

Revenus : 2839 euros net par mois

  • Salaire : 2451 euros net par mois
  • Prime : 877 euros par an soit en moyenne 73 euros par mois
  • Sous-location de son appartement : 315 euros par mois
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Claire devant un café et son porte-monnaie le 10 octobre 2014, à Paris
(Emilie Brouze/Rue89)

Dépenses : 2916 euros par mois

  • Logement : un 70 m2 en banlieue parisienne pour 1030 euros par mois

Claire s’est installée dans cet appartement avec son ex-compagnon. Il est aujourd’hui trop cher pour elle seule : en attendant un logement plus petit de la part de son bailleur social, elle sous-loue une chambre.

  • Charges (électricité, gaz, chauffage et eau) : 27 euros par mois en moyenne
  • Assurance logement : 15 euros par mois
  • Taxe d’habitation : 991 euros par an, soit 83 euros par mois
  • Impôt sur le revenu : 235 euros par mois en moyenne
  • Crédit : 166 euros par mois

Sur son dernier crédit – 7000 euros au début de l’été sur 48 mensualités –, la banque prend 400 euros d’intérêts.

  • Mutuelle : 56 euros par mois
  • Internet et téléphone portable : 60 euros par mois
  • Transports en commun : 15 euros par mois, l’équivalent d’un carnet de tickets
  • Vélo  : environ 4 euros par mois (réparations, entretien...)

Claire se déplace essentiellement à vélo ; elle habite à cinq minutes de son travail.

  • Cinéma (carte illimitée) : 20 euros par mois
  • Sorties (concerts, théâtres, bars, livres, abonnement à la médiathèque...)  : 100 euros par mois

« Je sors une à deux fois par semaine. Je ne vais pas voir de gros concerts... Au théâtre, je ne prends pas de places à plus de 15-20 euros. »

  • Yoga : 13 euros par mois
  • Chant : trois cours particulier à 40 euros, soit 120 euros par mois
  • Vacances : en moyenne 100 euros par mois

Cette année, Claire est partie en week-end à Naples (une offre à 120 euros les trois jours, sans les repas), trois semaines à Bali et quelques week-end chez sa famille, dans le Sud, ou entre amis.

« Si je ne faisais pas de crédits, je ne partirais pas en voyage. »

  • Frais bancaires : 9 euros par mois
  • Frais de santé : 175 euros euros par mois

Ils correspondent à sa psychanalyse, à raison d’une séance par semaine (en partie remboursée).

  • Courses alimentaires : en moyenne 280 euros par mois

« Je ne regarde pas les prix, et je n’ai pas la mémoire des chiffres. Mais depuis un an, je compare les prix au kilo et au litre : tout coûte tellement cher... J’évite Monoprix et j’essaie ces derniers temps de faire mes courses à ED et au marché. Je craque parfois pour le primeur. »

Certains mois, les dîners entre amis organisés par Claire peuvent faire grimper le budget de 150 euros :

« Cela n’arrive en moyenne qu’une fois par mois, mais quand j’invite quinze ou vingt personnes, j’ai toujours peur qu’il manque et je fais pour 40 ! »

  • Restaurants : 150 euros par mois

« J’y vais environ trois fois par semaine. J’essaie de limiter. »

  • Habillement : 50 euros par mois

« J’ai beaucoup réduit ces derniers mois, j’achète des fringues sur le marché ou dans les vide-greniers et je récupère des vêtements. »

  • Syndicat : 24 euros par mois

Claire est syndiquée à la CGT. Elle compte se présenter aux prochaines élections des représentants du personnel.

  • Don à Médecins du monde : 6 euros par mois
  • Cigarettes : 0 euro par mois

Claire a arrêté il y a quelques semaines (les clopes représentaient un budget de 60 euros par mois).

  • Cosmétiques (de marque) : 30 euros par mois
  • Cadeaux : environ 40 euros par mois
  • Permis de conduire : 30 euros par mois

Claire attend une date pour passer son permis. Elle apprend avec un tuteur dans une voiture à double-pédale, un service bon marché comparé aux auto-écoles.

  • Nourriture, litière, médicaments et vétérinaire pour son vieux chat  : 78 euros par mois

Epargne : rien

Chaque mois, Claire a un virement automatique de 200 euros sur son compte épargne. Elle puise dedans, en cas de besoin.

La fonctionnaire a aujourd’hui 3000 euros de côté, qui correspondent essentiellement à l’emprunt de juillet. La taxe d’habitation va bientôt réduire cette somme d’un tiers.

Claire est optimiste pour la suite :

« Je compte et j’espère que dans un an mon budget sera revu la baisse. »

 
 
 
Informations complémentaires :
 


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