Affaire Bettencourt : pour Nicolas Sarkozy, le silence est d’argent

Ceci dit, ça se comprend... (Informations complémentaires)

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Maintenu en prison, Patrice de Maistre, homme clé mais maillon faible de l’affaire Woerth-Bettencourt, pourrait-il tout révéler ?

Nicolas Sarkozy ne peut plus se contenter de balayer d’un revers de main les soupçons qui pèsent sur le financement de sa campagne de 2007. Son silence ne suffit plus à assurer sa défense. A la veille du premier tour de l’élection présidentielle, des explications sur ses relations avec la famille Bettencourt sont indispensables. Car tôt ou tard, la justice lui demandera la vérité, mais seulement après la levée de son immunité présidentielle. Au plus fort de la campagne, il ne peut laisser les affaires brouiller le débat et entretenir le fantasme d’un complot ourdi par la coalition d’un juge et du Parti socialiste…

RUDE. Le président-candidat doit ces explications parce que jamais depuis le début de son quinquennat, un juge d’instruction ne s’est autant approché de l’Elysée. En plaçant Patrice de Maistre - le gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt - en détention provisoire le 22 mars, le juge Gentil a très clairement signifié ses soupçons. Dans son ordonnance, révélée dimanche dernier par le JDD, le magistrat écrit d’ailleurs noir sur blanc qu’il soupçonne de Maistre d’avoir donné des enveloppes de billets à Eric Woerth, alors trésorier de l’UMP, afin de financer la campagne de Sarkozy (lire page 3). Depuis la convocation de Jacques Chirac comme témoin par le juge Eric Halphen en mars 2001, jamais un magistrat n’avait accompli un acte aussi rude à l’encontre d’un président de la République. Interdit de répondre à la justice, Nicolas Sarkozy ne peut laisser ces accusations en suspens.

Dépens. D’autant que depuis bientôt deux ans, le chef de l’Etat et son entourage ont semblé tout mettre en œuvre pour qu’aucune investigation ne soit menée. Des mois durant, le procureur Philippe Courroye, à Nanterre, s’est échiné à empêcher toute enquête indépendante, informant au plus près l’Elysée des avancées d’une procédure sous contrôle. Bernard Squarcini, à la tête de la DCRI, a lui aussi mis le plus grand zèle à épier des journalistes afin de s’assurer qu’ils n’iraient pas trop loin dans leurs révélations. Pour cela, le patron des services secrets comme le procureur de Nanterre ont aujourd’hui des comptes à rendre à la justice. Au final, il a fallu attendre le dépaysement du dossier Bettencourt à Bordeaux et la désignation d’un juge indépendant, Jean-Michel Gentil, pour que la justice passe enfin. Dans les explications attendues, la théorie de la manipulation ne pourra trouver aucune place. François Fillon l’a compris à ses dépens jeudi, sur France Inter, s’excusant immédiatement après avoir déclaré que l’affaire Bettencourt surgissait parce que «Hollande est en difficulté dans les sondages».

BOMBE. Interpellé par un journaliste de Médiapart le 16 février à Annecy, lors de son premier déplacement de campagne et une semaine après la mise en examen d’Eric Woerth, Nicolas Sarkozy avait répondu : «Je n’ai pas envie de parler de ça. On est en démocratie, et on a bien le droit de ne pas répondre aux questions. Vous avez le droit de les poser, j’ai le droit de ne pas y répondre.»

A présent, alors que la justice a confirmé vendredi le maintien en détention de Patrice de Maistre et renforcé le soupçon d’un financement occulte de sa campagne de 2007, et alors qu’une bombe judiciaire menace d’exploser, le président-candidat ne peut plus faire silence.

 

Par Éric Decouty

 
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Source : liberation.fr

Informations complémentaires :


4 mars 2010 : Bettencourt «Nicolas Sarkozy, c'est... par Mediapart


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