Crise de l'euro : les Grecs commencent à souffrir de la faim

La crise de l'euro aura touché de nombreux pays de manière brutale. Les Grecs, acculés par les dettes et les plans d'austérité commencent cependant à montrer des signes de malnutrition alarmants.

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De nombreuses familles grecques ont désormais besoin de la soupe populaire pour se nourrir.
photo: Onesecondbeforethedub CC

Une population dans la tourmente

Marcos Efcarpos n’a que dix ans, mais il sait déjà ce que la crise de l’euro signifie. Il vit avec sa mère, Nena, une professeure d’anglais célibataire, dans un appartement près de la mer situé dans le quartier pauvre de Kallithea. Un endroit habité par un nombre croissant de migrants, qui se heurtent souvent avec les membres d’Extrême-droite affiliés au parti néo-fasciste de l’Aube Dorée.

Ici, les revenus ont beaucoup chuté depuis le début de la crise financière de 2008, surtout lorsque le pays a dû entamer une difficile cure d’austérité pour rembourser sa dette.

« Ma famille paie encore des impôts, mais très bientôt, nous ne serons plus en mesure d’acheter ce dont nous avons besoin » explique le jeune Marcos, qui joue de la guitare et fait plus vieux que son âge. « C’est pour cela que nous sommes prudents dans nos dépenses. Nous n'avons que très peu de biens ».

Une pauvreté bien visible

Nena Efcarpos travaille onze heures par jour, six jours par semaine pour élever son fils. Et même si elle n’a souvent plus d’argent à la fin du mois, elle se considère chanceuse, car ses parents, qui vivent en milieu rural, lui envoient des fruits et des légumes de leur jardin. Marcos n’est pas capricieux. « Il a appris à demander si nous avons de l’argent avant de vouloir quelque chose » dit Nena. « Nous avons un nouveau slogan : 'Moins de besoins, moins de soucis'! »

En dépit de ces circonstances difficiles, Marcos se porte bien pour un enfant grec. Beaucoup d'autres grandissent en ayant faim. Le résultat saisissant des mesures d'austérité, de réductions de salaires et des augmentations d'impôts, qui ont été provoquées par la politique de remboursement du gouvernement hellène. Et qui affecte presque toute la population aujourd’hui.

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Depuis le début de la crise, le taux de pauvreté n'a pas cessé d'augmenter en Grèce.
Photo: Onesecondbeforethedub CC

Une classe moyenne qui n’existe plus

Les estimations pour le nombre d'enfants vivant en dessous du seuil de pauvreté varient. Les chiffres de l’Union Européenne indiquent que 439.000 jeunes enfants ou adolescents sont concernés, soit 23% de la population de moins de 18 ans. Une donnée en hausse de 2% depuis 2009. Hélas, ce nombre est indexé sur l’actuel salaire médian grec.

Matsaganis Manos, spécialiste de la pauvreté enfantine, affirme que ce chiffre a fait un « bond spectaculaire » entre 2009 et 2011, qu’il estime à environ 35%, si les gains actuels sont comparés avec ce que gagnaient les Grecs avant la crise. Et la décision du gouvernement de réduire les salaires d’un cinquième au début de l’année « a rendu les choses encore pires pour les familles et les enfants » dit-il.

Le changement de la société grecque se perçoit dans la rue. Les travailleurs sociaux disent même que certains quartiers pauvres d’Athènes connaissent une situation d’urgence humanitaire.

Un manque de nourriture

« Les gens commencent à être affamés » a déclaré Aglaia Konstantakopolou, qui travaille à la soupe populaire d’un Centre social situé dans le centre-ville d’Athènes, prévu à l’origine pour les étrangers.

« Les mères viennent mendier pour des couches, du lait pour leurs enfants ou de la nourriture » ajoute-t-elle. « Il y a deux ans, je n’aurais jamais pensé voir quelque chose de pareil. »

Les enseignants expliquent que les enfants ont souvent faim en classe. Beaucoup d’entre eux sautent l’école pour profiter des petits-déjeuners dans les abris de charité, ajoute Konstantakopolou.

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Les Grecs sont en colère envers le gouvernement et les mesures d'austérité.
Photo: Piazzadelpopolo CC

Les enfants, premières victimes de la faim

La condition physique des enfants a également un effet psychologique, surtout au niveau des plus jeunes, qui se culpabilisent eux-mêmes pour les effets de la crise.

« Lorsque les parents ne peuvent plus acheter des vêtements ou des jouets, les enfants pensent qu’ils ont fait quelque chose de mal et se sentent responsables » explique la psychologue pour enfants Salemi Parrisia. « Il y a des rapports qui montrent un nombre croissant d’enfants mal nourris, qui s’évanouissent à l’école, ou développent des phobies liées à cela. »

Bien qu’il faille mettre en cause la réduction de l’action des services sociaux, certains disent que l’inefficacité bureaucratique grecque explique en partie ces événements dramatiques.

Ilias Liberis, le directeur grec de l’UNICEF souligne des « faiblesses structurelles », surtout entre les nombreux organismes qui se chevauchent, ce qui empêche d’aider véritablement les enfants.

« Il y a de nombreux services et organisations censés aider les enfants, mais pas de coordination centrale ». De plus, la colère contre les mesures d’austérité, la corruption et le fonctionnement de l’économie ont noyé les appels à réformer les services de l’enfance.

Patras, une ville qui survit

Alors qu’elle est déjà une des villes les plus pauvres de la Grèce, l’ouest de Patras a été particulièrement touché par la crise. Le Conseil municipal estime que le nombre de pauvres a plus que doublé en moins d'un an.  Dans la cathédrale orthodoxe, les employés de la soupe populaire prépare quotidiennement des repas, composés de haricots, d’olives et de fruits.

« Le nombre de personnes qui viennent mendier grandit chaque jour » note la cuisinière, Konstantina Nikolinakou. «Avant la crise, on faisait à manger pour 30 personnes, maintenant on en sert 120. » Elle explique qu’il n’y en a jamais assez pour tout le monde. « On ne peut tout de même pas les chasser. »

Dehors, Maria Papanikolaou, 38 ans, et son fils Petros attendent les restes. Cette ancienne comptable a perdu son travail quand la société qui l’embauchait a fermé en septembre dernier, à cause de la crise.

« Quand je serais grand, j’emmènerais ma mère loin de la Grèce » explique Petros. « Je lui ai promis que nous irons sur une île, et que je deviendrai pêcheur. Comme ça, on aura de la nourriture et on sera plus heureux que maintenant. »

Global Post/ Adaptation Henri Lahera pour JOL Press

 

Source : Jolpress.com via Nath que l'on remercie ; )

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