En quoi les Français ont-ils encore confiance ? (La Tribune)

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Les « gilets jaunes » ont largement manifesté le scepticisme que leur inspire un chef de l’État critiqué pour sa pratique verticale du pouvoir. (Crédits : BVA/La Tribune)

Sondages 08 07 2019

BAROMÈTRE Les Français s'inquiètent pour la planète, l'avenir de leurs enfants et de la France. Notre sondage BVA-La Tribune révèle la défiance des citoyens après un hiver marqué par la mobilisation des « gilets jaunes ».

Vote de confiance, école de la confiance, contrat de confiance. Cette notion est dorénavant utilisée au quotidien dans les discours politiques et la vie des Français. Dans son programme et lors de sa campagne électorale, Emmanuel Macron avait exprimé une volonté de mettre fin au pessimisme ambiant. « J'ai décidé de me présenter à l'élection présidentielle car je veux redonner à chaque Française et à chaque Français confiance en eux, confiance en la France et dans notre capacité collective à relever nos défis. Ce faisant, nous redonnerons à l'Europe et au reste du monde confiance en notre pays », avait déclaré le candidat en mars 2017.

Plus de deux années ont passé, et le mandat du plus jeune président de la Ve République a été bouleversé par une crise sociale sans précédent. La colère des « gilets jaunes » a illustré le déficit de confiance d'un chef de l'État critiqué pour sa pratique verticale du pouvoir. Le maintien de la taxe carbone au moment où le prix du baril de pétrole flambait a provoqué l'exaspération de milliers de Français. À l'heure de l'acte II du quinquennat, Emmanuel Macron a promis un changement de méthode en annonçant une meilleure prise en compte des corps intermédiaires. Cette démarche pourrait se révéler déterminante si le président veut poursuivre ses réformes au pas de charge, en maintenant le cap comme il l'a annoncé.

Inquiets pour l'environnement

Interrogés pour La Tribune par BVA, les Français se montrent particulièrement inquiets à propos de l'avenir de la planète. Dans le détail, ils sont 39% à se dire inquiets et 45% à être plutôt inquiets dans le contexte d'une préoccupation grandissante pour les problématiques environnementales. Il existe quelques disparités en fonction des foyers. Chez les catégories socioprofessionnelles supérieures, ils sont 20% à se déclarer confiants dans le futur de la planète, contre seulement 14% chez les CSP inférieures. Au niveau politique, les sympathisants de la République en Marche (24%) et des Républicains (28%) se montrent bien plus sereins que les partisans du Rassemblement national (14%) ou du Parti socialiste (17%). L'avenir des enfants est également une thématique clivante. Si 26% des Français se déclarent confiants en moyenne pour l'avenir de leur progéniture, ils ne sont que 9% au RN.

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En revanche, les soutiens du parti majoritaire se montrent bien plus optimistes (47%), tout comme ceux de la droite (36%). Les chercheurs du Cevipof rappelaient dans une récente enquête que « depuis la Libération, le modèle social français a fonctionné sur la promesse que les générations futures vivraient mieux que les précédentes : les sacrifices des parents seraient les progrès des enfants. Or la décennie écoulée montre le refus de croire en cette promesse politique ».

En ce qui concerne l'avenir de la France, il existe un fossé générationnel. Si les plus de 65 ans sont les plus optimistes pour l'avenir de l'Hexagone (34%), c'est moins le cas pour les moins de 35 ans (23%). Sur le plan politique, les partisans de la République en marche sont en proportion plus nombreux (65%) à y croire que ceux du Rassemblement national (10%). Pour Christelle Craplet de BVA, « si les sympathisants de la France insoumise et ceux du Rassemblement national peuvent avoir des points communs sur leur niveau de vie, ils ont un rapport au monde différent, où le pessimisme est plus prononcé chez les partisans du Rassemblement national ».

Plus sereins sur leur avenir professionnel

Concernant leur avenir personnel, 50% des Français se disent confiants. Si l'âge ne représente pas un facteur déterminant, le niveau de revenu, en revanche, est important. Sans réelle surprise, il y a 19 points d'écart entre les catégories socioprofessionnelles supérieures et les catégories inférieures. La zone de résidence peut également avoir une incidence sur la confiance des individus. Si les résidents de l'agglomération parisienne sont 62% à être optimistes sur leur futur, ils ne sont que 42% dans les communes inférieures à 20.000 habitants, et 45% dans les communes rurales. Cette fracture s'est largement exprimée au plus fort de la crise des « gilets jaunes », où les habitants des villes de taille intermédiaire ont crié leur exaspération. Enfin, l'écart entre les partisans de la République en marche et ceux du Rassemblement national sur leur avenir personnel est considérable - 88% contre 32%.

Parmi les institutions et acteurs testées par BVA, la notion de proximité joue un rôle essentiel pour les Français. Ils sont 77% à exprimer de la confiance à l'égard des petites et moyennes entreprises (PME), contre 37% pour les grandes entreprises. Les syndicats patronaux arrivent vraiment en bas de tableau : 80% des répondants affirment qu'ils ne leur font pas confiance. Dans la sphère paritaire, les syndicats de salariés font légèrement mieux, mais une grande partie des Français demeurent méfiants (62%). Les « gilets jaunes » ont largement manifesté le scepticisme que leur inspire un chef de l'État critiqué pour sa pratique verticale du pouvoir.

Après les PME arrivent les hôpitaux publics (74%), les forces de l'ordre (73%) et, contre toute attente, les experts scientifiques (73% également). L'école (68%) et les associations (67%) arrivent en milieu de classement. Dans une récente enquête, le Cevipof, rattaché à Sciences Po, expliquait que ces acteurs présentaient des caractéristiques qui pouvaient être source de confiance « ou du moins l'antidote à la défiance : assurer une fonction de proximité, mener une mission de protection, être bienveillant et être compétent ».

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Méfiance vis-à-vis de la politique

La dernière décennie a été marquée par une forte défiance des Français à l'égard des politiques. Les résultats du baromètre indiquent que 88% des Français ne font pas confiance aux partis et que 76% sont méfiants à l'égard des députés et sénateurs. Si les citoyens sont relativement attachés à la démocratie, l'abstention, qui augmente, et le rejet de la classe politique sont profondément ancrés dans la population. Cela s'est traduit par la montée des populismes aussi bien en France que dans d'autres pays européens. L'économiste Daniel Cohen expliquait lors d'une récente table ronde organisée à Sciences Po qu'« il y a une relation très forte entre le sentiment d'insécurité économique et la montée des forces antisystèmes. La déception qui a pu s'accumuler au cours des décennies à l'égard des gouvernements en place, qu'ils soient de gauche ou de droite, nourrit cette réaction antisystème. Les "gilets jaunes" sont clairement dans ce front ». Dans la foulée du Grand débat initié par l'exécutif, 68% déclarent ne pas faire confiance au gouvernement pour poursuivre les échanges de manière régulière, et 31% ne font même pas du tout confiance au gouvernement d'Édouard Philippe.

Confiance Bva Sondage H299 Gouvernement Debat National

À l'opposé, seules 32% des personnes interrogées accordent du crédit au pouvoir en place. Là encore, il existe des contrastes. Si 44% des plus de 65 ans accordent leur confiance à Emmanuel Macron pour poursuivre le dialogue, ils sont bien moins nombreux dans les autres classes d'âge (autour de 29%). Au niveau des professions, les employés et les ouvriers se montrent très méfiants à l'égard du président : 75% d'entre eux ne lui font pas confiance malgré la multiplication des mesures sociales et fiscales en faveur des revenus modestes depuis le mois de décembre 2018. Ce niveau de défiance baisse chez les professions intermédiaires (65%), les cadres (60%), et les indépendants et chefs d'entreprise (58%). Sur le plan politique, tous les sympathisants de partis, hormis ceux de la République en marche, expriment de la méfiance à l'égard d'Emmanuel Macron, particulièrement au Rassemblement national (83%) et à la France insoumise (81%). Cette méfiance est moins prononcée chez les Républicains (72%), les écologistes (67%) ou les socialistes (66%).

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MÉTHODOLOGIE

Enquête réalisée auprès d'un échantillon de Français interrogés par Internet du 19 au 20 juin 2019. Échantillon de 1003 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.

La représentativité de l'échantillon a été assurée grâce à la méthode des quotas appliquée aux variables suivantes : sexe, âge, professions de la personne de référence du ménage et de la personne interrogée, région et catégorie d'agglomération.

 

Source : La Tribune.fr via Contributeur anonyme

 

Informations complémentaires :


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