Où est le corium du réacteur n° 2 de Fukushima Daiichi ?

On avait tenté de vous prévenir, il y a bien longtemps. À l’époque, quand j’ai esquissé ce risque de « syndrome chinois » on m’a taxé gentiment d’excentrique. N'en déplaise l'« arrêt à froid » proclamé par Tepco, et le fait que certains pensent toujours que Fukushima n'est pas un accident nucléaire... Il est peut-être temps de réviser votre jugement... À moins que vous aussi vous ne soyez magicien ? ; )

Update 26.02.2016 : Fukushima : 5 ans après, Tepco avoue avoir menti sur la gravité de l'état des réacteurs...

Update 10.05.2016 : Fukushima le désastre oublié...

Update 18.08.2016 : La mystérieuse affaire des Coriums disparus de Fukushima...

Après le premier essai infructueux du 19 janvier 2012 pour essayer de mesurer le niveau de l’eau dans l’enceinte de confinement du réacteur n° 2, Tepco a réalisé hier une deuxième tentative qui cette fois a porté ses fruits.

Mais les nouvelles sont très mauvaises. Alors que l’opérateur évaluait la hauteur de l’eau de refroidissement à 3 m, elle a constaté une hauteur de seulement 60 cm en fond de cuve de confinement. Cette nouvelle mesure, implacable, nous rapproche à nouveau du « scénario du pire », et cela le jour même, ironie du sort, où le candidat Nicolas Sarkozy affirme que l’accident de Fukushima n’est pas un accident nucléaire (1).

fukushimareactor2CV-March12.JPG

Cette image du Mainichi Daily News représentant grossièrement la coupe du réacteur n° 2 est totalement surréaliste, montrant le corium comme une matière inerte qui se serait sagement confinée en fond de cuve de réacteur (RPV) et en fond de cuve de confinement (PCV). Elle essaie de faire croire aux Japonais que la situation est toujours sous contrôle alors qu’il n’en est rien.

Pourquoi ?

1) Parce qu’elle ne montre pas le percement du fond de la cuve du réacteur

2) Parce qu’elle ne montre pas le creusement du fond de la cuve de confinement.

3) Parce qu’elle ne montre pas les dégâts occasionnés par l’explosion qui s’est produite dans la piscine torique le 15 mars 2011 à 6h10 et qui lui a fait perdre son étanchéité.

4) Parce qu’une hauteur d’eau de 60 cm est ridicule pour refroidir une masse de 94 tonnes de combustible fondu.

5) Parce que la température de 48,5~50°C des 60 cm d’eau en fond de cuve semble incompatible avec la présence de corium qui a une décroissante thermique extrêmement lente.

n2b.jpg

Voici une infographie plus réaliste mais tout aussi improbable, celle de NHK, qui place le niveau de l’eau de la cuve de confinement à hauteur de l’ouverture des tuyaux descendant vers la piscine torique, mais qui garde de l’eau en fond de cuve de réacteur alors que celui-ci est percé… Le corium quant à lui n’est pas représenté.

barrageevacuationdeseaux.jpg

L’eau contaminée du sous-sol pourrait-elle rejoindre l’océan par les innombrables canalisations souterraines reliant la centrale à la côte ? (source du plan : Tepco)

Où se trouve le corium ? Les températures relevées dans l’enceinte de confinement laissent supposer qu’il ne doit plus être là. Selon Gen4, « la vérité est que les coriums ont depuis longtemps perforé la cuve réacteur (RPV), le confinement primaire (cuve PCV) et secondaire (le radier en béton ou une variante par l'anneau de surpression) et qu'ils se sont finalement réfugiés quelque part sous les bâtiments ». (lien)

tepco.jpg

Schéma Tepco

Il est même possible que le corium, dans l’hypothèse où il a pris le chemin de la piscine torique par les tuyaux de bas de cuve (2), ait plongé dans l’eau du réservoir circulaire, provoquant une explosion de vapeur, et non une explosion d’hydrogène. Cette hypothèse a d’ailleurs sans doute été retenue par l’IRSN qui, pudiquement, indique une explosion dans la piscine torique du réacteur 2 en précisant qu’il ne s’agit pas d’une explosion d’hydrogène.

Tepco, qui n’aime pas dire les choses comme elles sont, préfère carrément nier cette explosion, se déresponsabilisant ainsi de la perte d’un corium dans la nature, événement qui n’est jamais arrivé dans l’histoire mondiale du nucléaire et qui fait partie du « scénario du pire ».

 

------------------------------

 (1) Discours du 26 mars 2012 à la centrale nucléaire de Saint-Laurent-des-Eaux : « C’est un accord électoral entre des gens sectaires qui profitent de l’accident de Fukushima, qui n’est pas un accident nucléaire, pour jouer sur les peurs et pour casser le nucléaire français. »

On peut l’écouter ici à 9:39 : http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=321997

(2) Les ouvriers de Tepco le pensent : http://fukushima-diary.com/2012/03/fukushima-worker-assumes-melted-fuel-has-gone-into-suppression-chamber/#.T3B7Ejw0_Lg.facebook

Source : fukushima.over-blog.fr

Informations complémentaires :

Crashdebug.fr : Corium : le point


Inscription à la Crashletter quotidienne

Inscrivez vous à la Crashletter pour recevoir à 17h00 tout les nouveaux articles du site.

Archives / Recherche

Sites ami(e)s