Ces Allemands qui veulent dynamiter l'euro

Comme quoi, de chaque côté du Rhin, il y a encore des gens qui savent compter... On sent bien néanmoins, dans cet article, qu'ils veulent décrédibiliser le mouvement, mais qu'ils sont obligé d'en parler, car ils ont atteint 7500 membres... D'ailleurs vous remarquerez aussi au passage l'omerta quasi totale qui perdure sur l'... en France...

Alors demandez-vous au final ce que l'on essaye désespérément (avec de plus en plus de mal) de vous cacher...

Amicalement,

F.

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A la tribune du congrès, Bernd Lücke (à droite), le fondateur d'AfD, a longtemps milité à la CDU.
© Jérôme Chatin / L'Expansion

A peine créé, Alternative für Deutschland rêve d'entrer au Bundestag avec un objectif radical : en finir avec la monnaie unique. Un programme qui rencontre un certain écho dans une partie de l'opinion, convaincue de payer pour le reste de l'Europe.

Et si la fin de l'euro commençait là, sous les lustres dorés de l'immense salle de bal de l'hôtel Intercontinental, au coeur de Berlin? Il est tout juste 7 heures du matin ce dimanche 14 avril et 1 400 militants d'Alternative für Deutschland (Alternative pour l'Allemagne), AfD pour les intimes, se pressent déjà sur le parquet pour la convention inaugurale de leur parti. Costumes de tweed, cravates, cheveux grisonnants : l'assemblée est surtout masculine, plutôt âgée, composée pour beaucoup d'universitaires, de juristes, de médecins, de fonctionnaires, d'ingénieurs et de petits patrons. "C'est la bourgeoisie qui se réunit ici, la bourgeoisie qui en a marre des impôts et qui craint de devoir en payer toujours plus pour sauver l'euro", s'exclame Max Rapp, 58 ans, architecte, adhérent depuis trois semaines et venu de l'autre bout du pays pour l'occasion.

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Le voici, leur grand projet, cette "alternative" qu'ils appellent de leurs vœux : la disparition pure et simple de la monnaie unique. Dans les allées, les mêmes arguments reviennent en boucle. Beaucoup se disent blessés par ces images d'Angela Merkel caricaturée en nazie lors de manifestations en Grèce. "L'euro divise les peuples au lieu de les réunir", déplore Heiner Garbe, la soixantaine bedonnante, un billet de 100 Deutsche Marks épinglé sur sa veste, telle une décoration militaire. Comme d'autres, il s'inquiète des milliards apportés en garantie financière par l'Allemagne à ses voisins du Sud, dispendieux et incapables de se réformer.

"Nous partons en retraite bien plus tard que les Grecs, et pourtant nous devons les renflouer", s'agacent Nadine et Katherine, deux blondinettes, benjamines de l'assemblée, venues avec leur père. Il y a aussi la politique des faibles taux de la BCE, qui pénalise les épargnants d'outre-Rhin, sensibles au niveau du bas de laine, ou encore ces "violations répétées" du traité de Maastricht, qui interdisait tout mécanisme de solidarité à l'égard des Etats endettés. Une forfaiture, pour ces Allemands attachés au droit.

Leur slogan : "Ni de droite, ni de gauche, mais de bon sens"

Au milieu des hourras et des ovations qui scandent les discours, s'élève surtout la joie des participants de ne plus être orphelins de toute représentation politique. En Allemagne, pour des raisons historiques, la construction européenne et l'euro sont en effet vécus comme un gage de paix. Un dogme indépassable, donc, pour les partis de gouvernement. Mal à l'aise ou ignorés dans leurs anciennes formations - la CDU d'Angela Merkel, les libéraux du FDP ou les sociaux-démocrates du SPD -, la plupart de ces nouveaux militants se cherchaient un autre port d'attache.

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garbe_adf_03_05_2013.jpgEt Hans-Olaf Henkel, l'ancien "patron des patrons", une figure respectée outre-Rhin. Encore s'est-il fait un peu forcer la main : "J'étais en vacances aux Galapagos quand le parti a été créé. Je n'étais au courant de rien, mais ils m'ont inscrit d'office sur la liste de leurs soutiens. J'ai décidé d'y rester, car je partage leurs idées." Il faudra, enfin, que l'état-major d'AfD affiche une stratégie claire pour la dissolution de l'euro. En son sein, certains prônent en effet le retour aux monnaies nationales, d'autres plaident pour une sortie progressive des pays du Sud, d'autres encore pour la création de deux euros, un euro-Nord et un euro-Sud.

Leurs opposants et les médias les qualifient de "populistes"

Mais c'est la bataille de l'image qui s'annonce la plus dure à gagner. "Leurs opposants, mais aussi les médias, les qualifient de populistes. Or, en Allemagne, c'est le plus sûr moyen de perdre tout crédit", constate Nicolaus Heinen, spécialiste de l'Europe à la Deutsche Bank. Bernd Lücke a flairé le danger. "Chaque demande d'adhésion est examinée, pour ne pas inscrire d'anciens de l'extrême droite", répète-t-il à l'envi. Symbolique : pendant le congrès, un vieil homme en chemise brune, drapeau allemand en écharpe, a failli se faire sortir de la salle quand il s'est mis à agiter frénétiquement un étendard noir-rouge-or au-dessus de sa tête, captant l'attention des dizaines de photographes présents.

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Reste que, dans le même temps, tout débat sur le court programme du parti (trois pages et demie seulement !) a d'emblée été exclu par les organisateurs, au nom de l'efficacité. Étonnant, pour un mouvement qui prône la démocratie directe et dénonce la "dégénérescence du parlementarisme allemand"... Ce même programme prévoit par ailleurs une politique d'immigration restrictive - mais habilement présentée comme une façon de "protéger les candidats à l'immigration des risques liés à leur mauvaise intégration".

Une chose est sûre : ces nouveaux venus en politique inquiètent les partis établis. Angela Merkel a beau n'avoir jamais été aussi populaire, ses partisans ont sorti l'artillerie lourde contre la petite AfD. Car si ses chances de dépasser les 5 % des voix - le minimum requis pour entrer au Bundestag - ne sont pas assurées, le parti pourrait prendre assez d'électeurs à la CDU, à ses alliés du FDP et de la CSU pour les fragiliser, voire les précipiter dans l'opposition. Un paradoxe, pour une formation surtout constituée d'anciens conservateurs.

"C'est un risque à courir : la CDU et les sociaux-démocrates sont sur la même ligne proeuro. Si nous les bousculons, nous les influencerons", s'enthousiasme Michael Wichtrey, jeune quadra pour qui "participer au congrès est déjà une façon de montrer notre colère à nos dirigeants". Bernd Lücke veut d'ailleurs voir dans les positions très dures prises par Angela Merkel à l'égard de Chypre un premier signe de son influence. Plus que l'entrée au Parlement, c'est sans doute là son véritable but.

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Ils ne sont pas allés jusqu'à créer leur parti. Il faut dire qu'en France le créneau de l'euroscepticisme est déjà pris sur la scène politique : Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche), Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République) ou Marine Le Pen (FN) en font un argument électoral. Mais, ici aussi, des économistes se mobilisent autour d'une même idée : mettre un terme à la monnaie unique de façon ordonnée, pour éviter une "débâcle incontrôlée".

Le petit groupe rassemble des chercheurs venus de tous les horizons, de la gauche de la gauche (Jacques Sapir) aux plus libéraux (Gérard Lafay, Alain Cotta). Leur think tank, l'institut Pomone (Pour une nouvelle politique monétaire en Europe), a tenu sa première réunion à Paris début avril, en présence des fondateurs d'Alternative für Deutschland.

"Nous voulons multiplier les rencontres avec les banques, les médias, les entreprises : les politiques menées au nom de l'euro sont criminelles, car elles appauvrissent les populations", résume Jean-Pierre Gérard, ancien membre du Conseil de politique monétaire de la Banque de France, président du nouvel institut. "La zone euro est trop hétérogène : pour que l'Union monétaire fonctionne, il faudrait des transferts financiers massifs entre l'Allemagne et les pays du Sud", a encore expliqué Jacques Sapir.

L'euro serait voué à l'échec, selon ces experts, personne n'ayant les moyens de financer ces transferts, et toute dévaluation compétitive étant impossible. En attendant, "la monnaie unique ravive les tensions entre les peuples", ajoute Jean-Pierre Gérard. Voilà un autre point commun entre ces eurosceptiques français et ceux d'outre-Rhin : tous se disent profondément proeuropéens.

 

Source : Lexpress.fr via Maître Conficius

Informations complémentaires :

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