Média et propagande : Pour en savoir plus sur ce qu’il se passe en Thaïlande…

La BBC se range ouvertement aux côtés du régime thaïlandais et fait un portrait des manifestants comme étant violents et anti-démocratiques

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Manifestation anti-gouvernementale à Bangkok (Thaïlande), le 9 décembre 2013. D. MARTINEZ / REUTERS

Tony Cartalucci

 26 Décembre 2013

La Thaïlande est en ce moment même dirigée par Thaksin Shinawatra. Thaksin n’était pourtant pas sur les bulletins de vote durant les dernières élections générales, il n’était même pas dans le pays, mais comme l’a rapporté le New York Times dans son article, "In Thailand, Power Comes With Help From Skype," il est toujours aux manettes:

Cette dernière année et demie, de l’admission même de son parti politique, les décisions politiques les plus importants de ce pays de 65 millions d’habitants, ont été prises depuis l’étranger, par un ancien premier ministre en auto-exil depuis 2008 afin d’échapper à la justice de son pays pour accusations et condamnation de corruption.

Le fugitif le plus céèbre du pays, Thaksin Shinawatra, parcourt le monde à bord de son jet privé, parlant avec des ministres sur ses plus de douze téléphones portables, textant sur les médias sociaux variés et lisant des documents gouvernementaux qui lui sont envoyés via email par de hauts-fonctionnaires, disent les pontes du parti.

Ceci pourrait être décrit comme “gouverner par skype” ou le gouvernement par la messagerie instantannée, une façon pour Thaksin d’aider à diriger le pays sans avoir à faire face au mandat d’arrêt lancé contre lui dans un cas que beaucoup considère comme politiquement motivé.

Thaksin est tellement arrogant, qu’il fît utiliser comme slogan de la dernière campagne électorale: “Thaksin pense, Puea Thai fait”. Son inepte sœur Yingluck Shinawatra, qui n’a jamais tenu de fonction publique dans sa vie est soudainement devenue “premier ministre de Thaïlande”, place les Thaksin dans une embarrassante démonstration de népotisme du tiers monde.

Mais le régime actuel thaïlandais abrite d’autres caractéristiques bien plus noires que cette corruption cartoonesque de république bananière. Thaksin Shinawatra, alors qu’il était en fonction de 2001 à 2006, conduisit une “guerre contre la drogue” brutale. Ce fut en fait une campagne de 90 jours d’exécutions extra-judiciaires dans les rues qui tua plus de 3000 innocents, dont plus de la moitié furent révélés n’avoir rien à faire avec le trafic de drogue et dont aucun ne fut à aucun moment arrêté, mis en examen ou mis devant un tribunal.

Malgré la brutalité de ce qui fut dans toute sa mesure un crime contre l’humanité, la “guerre” fut très populaire au sein de ses supporteurs (voir l’article de the Economist’s: Thailand’s Drug Wars – Back on the Offensive), qui n’ont apparemment aucun concept ou préoccupation pour les droits de l’Homme, les procès et la présomption d’innocence tant que non prouvé coupable, les mêmes supporteurs du reste, qui votent pour le réélire au pouvoir encore et toujours.

Un criminel de l’espèce de Thaksin ne serait pas un homme libre s’il avait commis ses crimes en occident (NdT: cela reste néanmoins encore à voir de nos jours…) ou dans un pays qui serait en conflit avec l’occident. Il se serait retrouvé comme membre mineur de “l’axe du mal” et certainement qu’aucun gouvernement qu’il mènerait directement ou indirectement ne serait considéré comme “légitime” ou “démocratiquement élu” et ce sans compter du soutien populaire qu’il serait censé avoir. Ses suiveurs politiques et fidèles seraient appelés et étiquetés comme des “fanatiques”.

Un criminel condamné qui mène un parti politique par procuration en occident serait chose impensable (NdT: plus pour longtemps…) et de la même manière cela est pensé comme étant inacceptable en Thaïlande également. Voilà ce qui a amené des millions de personnes dans les rues pour protester contre le cœur de cette crise politique sans fin qui se déroule de nos jours en Thaïlande. Il n’y a aucun effort pour arrêter les élections en Thaïlande, simple effort de stopper les élections factices de ce régime, élections qui vont être tenues contre les vœux de la commission électorale de la nation, et avec tous les partis d’opposition les boycottant.

Et aussi sérieux et importants que soit tout ceci pour ceux qui essaient de compendre la Thaïlande de l’extérieur et sa crise politique actuelle, aucun de ces faits ne furent rapportés par la BBC dans ses derniers reportages et comptes-rendus.

Titré, "Thailand protests: Yingluck government rejects election delay," l’article annonce: Que le gouvernement thaïlandais a rejeté aujourd’hui les appels a reporter les élections de Février et ce durant de violentes manifestations qui ont vu la mort d’un policier, tué par balle. La Commission Nationale Electorale avait demandé un report par souci de sécurité pour les candidats en campagne, mais le gouvernement a dit que l’assemblée nationale avait déjà été dissoute et qu’il n’y avait aucune raison d’attendre pour de nouvelles législatives. Le peuple veut que le gouvernement démissionne et qu’il soit remplacé par un “conseil populaire” non élu.

L’article a été spécifiquement écrit pour rendre responsable les manifestants de la mort du policier alors qu’il avait déjà été rapporté par l’agence Reuters que celui-ci avait été tué par des tireurs non identifiés depuis les toits. L’article déclare également que les manifestants veulent que le gouvernement soit remplacé par un “conseil populaire” non élu, ce qui induit volontairement en erreur. Les manifestants quotidiennement, en langues thaïe et anglaise réitèrent qu’ils n’ont aucune intention de stopper le processus démocratique, ni les élections.

Le but est de virer Thaksin Shinawatra et sa clique de dangereux criminels, et leur influence corrosive sur le pays, avant que de véritables élections libres et régulières puissent être tenues. Le conseil n’est aucunement différent des corps non élus qui ont pris le pouvoir au cours des nombreuses “révolutions colorées” soutenues et fomentées par l’occident à travers le monde, ainsi que l’autorité provisoire d'Irak d’obédience impérialiste, qui a dirigée la nation moyen-orientale décimée peu de temps après que l’occident l’eut envahi et occupé. La différence bien sûr étant que ce conseil ne travaillerait pas pour Wall Street, alors que les autres le firent.

Mais l’article continue avec l’”analyse” du journaliste de la BBC Jonathan Head - already exposed as a peddler of falsehoods – qui déclare : Dans la plupart des autres pays, une attaque sur un site d´élection par des manifestants armés de frondes et de bombes artisanales résultant dans la mort d’un policier par balle, aurait déclenché une réponse robuste des autorités. Un état d’urgence peut-être, ou le déploiement de l’armée comme cela s’est produit à Bangkok en 2010.

Ceci ne se passe pas en Thaïlande, que des manifestants soient laissés libres de bloquer les routes, d’occuper des ministères et de lancer des assauts sur un stade où des partis politiques essayaient de préparer des élections démocratiques, en dit long sur l’état polarisé de la Thaïlande en ce moment.

Une fois de plus, le policier a été tué par des tireurs non identifiés qui étaient localisés sur un toit voisin de la manifestation (NdT: les tirs ne sont pas venus de la foule, personne ne sait de quel bord sont ces tireurs, une enquête est en cours…) et non pas des manifestants clashant avec la police en dessous. Head invoque encore les violences de 2010, dans lesquelles Thaksin Shinawatra fit déployer quelques 300 mercenaires professionnels lourdement armés dans une tentative violente de ressaisir le pouvoir. Ces mercenaires (d’après l’ONG Human Rights Watch) ont attaqué les troupes anti-émeute avec des AK-47, M16 et des lance-grenades M79, tuant 7 soldats incluant un officier du commandement (un colonel), ce qui déclencha des semaines de combats de rue et provoquèrent la mort de 92 personnes. Cette violence à la fois dans son contexte et son échelle n’est en rien comparable avec ce qu’il s’est produit aujourd’hui, mais Jonathan Head espère que les lecteurs ne sont pas au courant des détails ainsi que d’autres faits alors qu’il nous vend un narratif des faits malhonnête.

Head aime utiliser l’expression “élection démocratique”, parce que cela suffit à qualifier dans l’esprit de beaucoup tout processus électoral comme étant “légitime”. Bien sûr, en réalité, beaucoup des pires autocraties du monde, passées et présentes, ont utilisé les élections comme moyen de se prêter à elles-mêmes une légitimité usurpée et non-existente. Quelques exemples viennent à l’esprit: l’Irak de Saddam Hussein, la Corée du Nord et la despotique autocratie d’Arabie Saoudite où la moitié du pays est privée du d roit de vote, mais qui est  toujours défendue par la BBC comme étant une “réformatrice précautionneuse”.

Tout comme dans l’Irak de Saddam Hussein, la Corée du Nord de Kim Jong Un ou l’Arabie Saoudite, les élections thaïlandaise ne mettront en scène qu’un seul parti avec une famille le dominant : Les Shinawatra. Voter est obligatoire et dans de nombreuses régions de la Thaïlande rurale où Thaksin a particulièrement retranché sa machine politique, la dissidence fait souvent face à l’intimidation, la violence et la mort occasionnelle. Les élections en Thaïlande avec les Shinawatra impliqués sont tout ce qu’on veut sauf démocratiques et le processus n’est fait que pour tirer avantage d’une minorité qui trouve que les exécutions extra-judiciaires d’innocents est acceptable, le népotisme préférable et la voix de l’opposition intolérable, ils s’alouent la même crédibilité politique qu’un Saddam Hussein, un Kim Jong Un ou une maison des Saoud, lorsqu’ils organisent leur escroquerie d’élections.

Jonathan Head de la BBC a déjà sans aucun doute démontré son aversion de la vérité et il le fait encore dans sa dernière bafouille commise. Mais ceci va au-delà de “Head le propagandiste”, c’est une manipulation systématique de la vérité par les médias occidentaux en général, parce qu’en plus d’être un assassin en série et un criminel condamné, Thaksin Shinawatra est aussi très bien connecté avec Washington et Wall Street:

  • A la fin des années 1990. Thaksin était un conseiller pour la firme privée d’équité du Carlyle Group. Il permit alors à ses contacts étrangers qu’une fois en place comme premier ministre, il demeurerait un entremetteur entre le fond d’équité américain et le monde des affaires thaïlandais.
  • En 2001 il privatisa les ressources et infrastructures de la Thaïlande incluant le compagnie pétrolière nationale PTT à la grande satisfaction de Wall Street.
  • En 2003, il envoya des troupes thaïlandaises pour l’invasion américaine de l’Irak et ce malgré de larges protestations venant à la fois de l’armée thaïlandaise et de l’opinion publique. Thaksin permit également à la CIA d’utiliser le territoire de la  Thaïlande pour son horrible programme de rendition/kidnapping et sous-traitance de la torture.
  • Aussi en 2004, Thaksin tenta de forcer un accord de libre-échange entre les Etats-Unis et la Thaïlande, le FTA, sans aucun accord parlementaire, soutenu par le conseil des affaires commerciales US-ASEAN, qui juste avant les élections de 2011 qui virent la sœur de Thaksin Yinglulk Shinawatra arriver au pouvoir, accueillit les leaders du Front Uni contre la Dictature des “chemises rouges” de Thaksin à Washington DC.
  • Depuis 2006 et le coup d’état qui a renversé le régime Thaksin, celui-ci a été représenté par des élites corporatives et financières américaines au travers du lobbying d’entreprises telles que Kenneth Adelman de Edelman PR (Freedom House, International Crisis Group (Soros), PNAC (Project for a New American Century)), James Baker de Baker Botts (CFR et Carlyle Group, NdT: où pantoufle aussi le frère de Sarkozy)), Robert Blackwill (CFR), Kobre & Kim, Vell Pottinger et actuellement Robert Amsterdam d’Amsterdam & Partners (Chatham House).
  • Cette année, le parti poloitique de Thaksin, Puea Thai, a amendé l’article 190 de la constitution thaïlandaise. Ceci enlève les obstacles qui l’empêchaient de prendre des mesures destructives, et hautement impopulaires de l’accord du FTA de 2004 et d’autres traités qui dimininueront sinon détruiront la souveraineté de la nation thaïlandaise au profit de Thaksin et de ses sponsors occidentaux.

Jonathan Head de la BBC n’est pas stupide, il fait simplement ce que la BBC fait de mieux: prendre le fric et les directives de la part des élites friquées de Wall Street et de la City de Londres et de pirouetter les faits pour un narratif qui leur convient au mieux. Thaksin Shinawatra et sa sœur Yingluk, les “démocrates populaires” de Thaïlande, reflètent au mieux la relation intime et l’immense invstissement que l’occident a placé dans la famille Shinawatra, même si cela ne reflète en rien la réalité.

 

Source : Landdestroyer.blogspot.fr via Resistance71

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 


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