Comme vous le savez, le cheval de bataille, en ce moment du patronat, est la baisse des salaires, et il semblerait avoir une arme redoutable pour cela, les APC soit 'Accord de Performance Collective', les salariés de Ryan Air sont en train d'en faire l'expérience, le vœu de Goldman Sachs de 2013 se réalise...

N. SAINT-AFFRE/LA DEPECHE DU MIDI/MaxPPP
C'est un outil très flexible que les entreprises découvrent en temps de crise. Le sous-traitant aéronautique Derichebourg, les compagnies Air Caraïbes, French Bee, Ryanair… Tous envisagent de signer un accord de performance collective (APC), un dispositif introduit en 2017 dans le Code du travail avec les " ordonnances Macron ". Son principe est simple : les salariés acceptent de faire des efforts, en rognant par exemple sur leur rémunération, en échange d'une promesse de maintenir l'emploi. " Les accords de performance offrent la possibilité de négocier avec les syndicats une réduction des rémunérations, une modification du temps de travail à la hausse comme à la baisse ou encore la réduction du nombre de jour de repos (RTT)", décrypte Deborah David, avocate associée au cabinet De Gaulle Fleurance.
Autre grande nouveauté : la signature d'un accord s'impose au contrat de travail. En clair, si un salarié refuse, il peut être licencié pour cause réelle et sérieuse, ce qui diminue considérablement le risque juridique pour les entreprises. Dernier changement de taille : une firme n'est plus obligée de justifier de difficultés économiques, comme c'était le cas avec les accords de maintien dans l'emploi de François Hollande, très critiqués pour leur complexité. Enfin, les accords de performance doivent être simplement déposés au ministère du Travail sans validation de l'administration, ce qui simplifie considérablement le processus.
Mais un solide garde-fou existe pour éviter les dérives : un APC doit être entériné par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50% des suffrages au premier tour des élections professionnelles. "Cette obligation place au cœur du jeu les syndicats, qui ne vont pas s'engager sur un accord bancal, mal ficelé et sans contrepartie pour les salariés", estime Bertrand Martinot, économiste spécialiste du marché du travail. Constat identique pour Laurent Termignon, avocat au cabinet Willis Towers Watson : " On ne peut pas conclure ce type d'accord sur un coin de table en quelques heures, affirme-t-il. C'est un processus long qui demande une attention particulière au dialogue social. L'entreprise doit prendre le temps de discuter avec les délégués syndicaux pour établir un diagnostic de la situation économique en partageant des informations parfois sensibles." Autre nécessité : " Il faut inclure dans l'accord une clause de retour à meilleure fortune, avance l'avocate Deborah David. Et des contreparties pour les salariés, comme de la formation professionnelle."
Brutalité dénoncée
Dès lors, tout passage en force est voué à l'échec. L'exemple récent le plus probant est celui de Ryanair : la compagnie aérienne irlandaise veut baisser les salaires de ses employés français via un accord de performance, faute de quoi elle brandit la menace d'un plan massif de licenciements. Cette brutalité a suscité l'ire de la ministre du Travail, Muriel Pénicaud : " Ils ne respectent pas la manière dont on procède en France, et je pense que c'est une erreur. Les accords de performance n'ont pas été conçus pour cela. "
Même condamnation sans appel de Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef, qui dénonce un « chantage à l’emploi ». Quant à François Hommeril, leader du syndicat des cadres CFE-CGC, il fustige l’attitude de Ryanair, tout en dénonçant le dispositif : « Cet instrument ne sert à rien, c’est du bricolage qui vise à gagner de la compétitivité via une pressurisation des coûts salariaux. Cela ne marche jamais et ne redresse pas sur le long terme une entreprise en difficulté. » A n’en pas douter, la polémique ne va pas faiblir. Surtout si le nombre des accords de performance venait à exploser.
Florian Fayolle
Source : Challenges.fr via Contributeur anonyme
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