La Chine envoie sa première femme dans l'espace

La Chine lance son quatrième vol spatial habité. Pour la première fois à son bord, une femme. Un événement qui, s'il réussit, tombera à pic pour le régime chinois.

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Liu Yang, Jing Haipeng et Liu Wang doivent s'envoler samedi à bord du vaisseau Shenzhou IX. © Xu haihan / Imaginechina

De nos correspondants à Pékin, et Sébastien Melis

Arrimé à la fusée Longue Marche, le vaisseau Shenzhou IX a décollé ce samedi 16 juin à 18 h 37 précises (12 h 30, heure de Paris), depuis la base de Jiuquan, située dans le désert de Gobi, en Mongolie-intérieure, selon des images diffusées par la télévision nationale chinoise. Depuis quelques jours, les spéculations allaient bon train dans les médias chinois, et plus encore sur Weibo, le Twitter chinois. En suspens, le profil de la jeune femme qui devait rejoindre en compagnie de deux autres taïkonautes masculins, la station spatiale Tiangong-1, actuellement en orbite autour de la Terre.

C'est vendredi que l'agence officielle Chine nouvelle a finalement révélé l'identité de Liu Yang, une pilote de chasse de l'Armée de libération populaire (ALP). Née dans le Henan, cette trentenaire au visage fendu d'un large sourire entre samedi dans l'histoire, en prenant place à bord du "Vaisseau divin". La jeune femme aura pour tâche d'amarrer manuellement le vaisseau Shenzhou IX à la station Tiangong-1. Une technique difficile connue sous le nom de "rendez-vous spatial", que les États-Unis et la Russie maîtrisent depuis les années 1960. Les trois taikonautes chinois devraient ensuite rester une quinzaine de jours à bord de la station pour réaliser des expériences.

Station spatiale chinoise

S'il est réussi, ce voyage constituera une étape clé dans le projet ambitieux de la Chine : posséder sa propre station spatiale d'ici 2020. "Le vol habité ne sert à rien en soi. Ce qui compte, c'est pouvoir faire vivre des cosmonautes dans l'espace, explique Isabelle Sourbès-Verger, chargée de recherche au CNRS et spécialiste du programme spatial chinois. Pour Pékin, ce vol habité est donc d'abord une preuve d'autonomie. La Chine veut acquérir une expertise pour démontrer qu'elle maîtrise toutes les étapes d'un programme spatial, et, in fine, sortir de son isolement en décrochant un accord de coopération internationale", poursuit cette géographe, en rappelant l'exclusion de la Chine de la Station spatiale internationale (ISS) par les États-Unis.

Mais il y a aussi une dimension purement politique et nationale dans l'énorme opération de propagande qui entoure ce lancement. Pékin aimerait tourner la page d'une séquence médiatique particulièrement défavorable à son régime, empêtré depuis le mois de février entre l'affaire Bo Xilai (la chute du Prince rouge de Chongqing) et l'affaire Chen Guangcheng (l'avocat aveugle finalement parti pour les États-Unis). "D'habitude, les lancements spatiaux ont lieu à l'automne. Celui-ci coïncide étrangement avec des événements politiques internes. La Chine est devenue experte dans la planification et la médiatisation de ces spectacles spatiaux qui renforcent la popularité du Parti communiste", relève ainsi Joan Johnson-Freese, professeur au Naval War College, (Newport) aux États-Unis.

"Logique d'imitation"

Si le vol se déroule bien, La Chine deviendra ainsi le troisième pays, après les États-Unis et l'URSS, à envoyer une femme dans l'espace grâce à sa propre technologie, neuf ans seulement après réalisé son premier vol habité en 2003 avec le cosmonaute Yang Liwei. "Envoyer une femme dans l'espace est une façon symbolique de reconnaître la moitié de l'humanité. Cela attire les médias, mais en réalité la Chine suit simplement une logique d'imitation. Elle ne fait que reproduire ce qui a déjà été fait par les États-Unis et la Russie", tempère Isabelle Sourbès-Verger.

Quarante-neuf ans, jour pour jour, après le voyage dans l'espace de la Soviétique Valentina Terechkova, la présence de Liu Yang dans l'équipage chinois démontre que la Chine avance aussi vite dans le domaine spatial qu'en matière... de communication politique !

 

Source : Le Point

 


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