L’actualité de la crise : le sur place n’est pas une option

Par François Leclerc

LE SUR PLACE N’EST PAS UNE OPTION

Tandis que le G20 Finances se terminait à Washington sous le signe d’un sévère échec, faute de décisions, la crise de la dette publique en Europe rebondissait, en raison de l’attitude dilatoire du gouvernement Allemand à la suite de la demande officielle d’activation du plan de sauvetage financier de la Grèce. Mais que pouvaient-ils les uns et les autres décider ?

A Washington, en effet, un accord n’a pas pu être trouvé au sujet du projet de taxation des établissements financiers, dans la cacophonie ambiante à ce propos. Tandis que la déclaration finale alignait les pétitions de principe et les formulations creuses, réaffirmant à la fois la nécessité de préparer des plans de sortie de crise tout en estimant que le soutien public à l’économie devait être maintenu, « si cela est cohérent avec la viabilité des finances publiques », « jusqu’à ce que la reprise soit fermement conduite par le secteur privé et mieux établie ».

Les ministres des finances du G20, qui n’ont pas été en mal de phrases ronflantes à défaut de pouvoir annoncer une orientation commune claire, ont également « mis l’accent sur la nécessité d’avoir des politiques économiques bien coordonnées qui soient cohérentes avec des finances publiques saines, la stabilité des prix, des systèmes financiers efficaces et résistants, la création d’emplois et la réduction de la pauvreté ». Demain, on rasera gratis !

Les gouvernements occidentaux, comme les banques centrales, n’ont plus d’autre politique que le sur place, dépassés par les évènements, incapables de prendre l’initiative, car cela supposerait des mises en cause qu’ils ne sont prêts ni à assumer, ni même à concevoir. Sans doute sommes-nous de ce point de vue arrivés à un tournant de cette crise. Les mots n’ont pas de prise sur elle tandis que les actes font défaut.

En Europe, les interrogations se multiplient à propos de l’attitude du gouvernement allemand. S’agit-il simplement de gagner encore du temps, avant l’échéance électorale du 9 mai prochain, cruciale pour la coalition au pouvoir – déjà très éprouvée par ses contradictions internes – ou bien de mettre en musique une politique ayant comme véritable objectif la sortie de la Grèce de la zone euro, puis sa reconfiguration avec par exemple l’entrée ultérieure de la Pologne? Avec en arrière pensée l’idée d’imposer aux autres pays, en premier lieu la France, de rentrer sans plus tergiverser dans le carcan de la réduction à marche forcée des déficits?

En réalité, ni l’une ni l’autre de ses explications n’est probablement la bonne. Car ce qui continue de dominer dans cette crise, c’est bien davantage la totale improvisation dans laquelle les gouvernements européens tentent de la gérer, plutôt que le déroulement logique d’un plan allemand qui trouverait prochainement son aboutissement. Si cette dernière hypothèse devait se révéler exacte, on peut d’ailleurs se demander, dans la tourmente que créerait la sortie grecque de l’euro, quelle serait la capacité du gouvernement allemand à empêcher que la crise ne se poursuive et atteigne non seulement le Portugal, mais aussi l’Espagne, aboutissant alors à une crise générale de l’euro.

On peut aussi douter que les banques européennes, Allemandes et Françaises en premier lieu, puissent affronter le risque d’un défaut grec, inévitable alors, qui aboutirait obligatoirement à la négociation d’un plan de restructuration de la dette grecque, c’est à dire à une décote atteignant les créanciers. Une situation qui serait susceptible de coûter très cher à ces deux pays et qui de surcroit mettrait à bas les banques grecques, avec un effet domino garanti dans toute l’Europe.

Mais tout est possible quand il n’y a plus de pilote dans l’avion. Lorsque toutes les décisions possibles sont mauvaises. Car les objectifs qui ont été assignés aux gouvernement grec ne sont pas réalistes. Le sont-il pour autant pour les autres pays de la zone euro ? Y compris pour l’Allemagne, à y regarder de plus près ?

Les Européens ont le redoutable privilège de faire face en premier à la crise de la dette publique. Tim Geithner vient d’annoncer qu’il escomptait pour 2011 une reprise tirée par le secteur privé qui permettrait de commencer à réduire le déficit américain. Puisqu’il le dit…

Par François Leclerc sur le Blog de Paul Jorion


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