Vous voyez... Je ne suis pas le seul à m'interroger sur l'état de notre Nation. Mais là c'est plus grave, car ce sont 20 milliards à la clef, pour le mythique Rafale ... que l'on n'a du reste jamais vendu (Merci M. Dassault), et de sacrés débouchés en perspectives. Les Indiens sont au top en matière d'informatique et de technologie... Enfin tout ceci a un coût aussi, car il est question de transfert de technologie, et de produire les avions ... là-bas... Et qui a payé cette technologie en grande partie ? Vous voyez tout n'est pas si simple...
Certains naïfs s'étonnent (sauf bien évidemment les lecteurs de DeDefensa, depuis longtemps avertis) de voir l'acharnement mis par les Américains, mais aussi par les Britanniques et d'autres Européens, à obliger la France à refuser de livrer à la Russie les BPC Mistral déjà commandés.
Il est évident que si la France cédait à ces pressions, elle se déconsidérerait totalement aux yeux des autres pays susceptibles de lui acheter des matériels militaires ou de conclure avec elle des accords intergouvernementaux pour des développements technologiques partagés. S'il s'avérait que la France cédait aux pressions de Washington dans le cas du Mistral, pourquoi ne le ferait-elle pas dans le cas de tels accords, s'ils contredisaient les ambitions d'exportation ou les intérêts politiques des Etats-Unis.
Or il ne s'agit pas d'une perspective théorique. Nous avons indiqué précédemment que l'Inde a décidé d'augmenter ses crédits en matière de défense, y compris en vue de contrats avec des pays susceptibles de lui permettre l'accès à des technologies avancées. D'ores et déjà, selon Bourse.com, citant The Times of India, l'Inde aurait entamé les négociations finales avec Dassault Aviation concernant le contrat d'acquisition de 126 « Rafale » , pour moderniser son armée de l'air. (Opération MMRCA pour medium multirole combat aircraft). En ces matières, rien n'est jamais acquis avant des signatures irrévocables. Mais, écrit le Times of India, l'Inde « poursuit avec sérénité les négociations finales pour l'acquisition de 126 chasseurs français Rafale, dans un projet de 20 milliards de dollars ».
Des sources obtenues au ministère de la défense par le quotidien laissent entendre qu'une nouvelle réunion est prévue cette semaine entre les autorités, Dassault Aviation et son partenaire Hindustan Aeronautics (HAL). Les négociations, complexes, auraient finalement atteint un point qui pourrait permettre de les finaliser sous trois mois, ajoute le journal, qui estime que plus de 50% du contrat final et des accords intergouvernementaux sont acquis. Après ça, le politique entrera en jeu, a indiqué la source au “Times of India”, avec le processus d'approbation de la commission gouvernementale pour la sécurité, puis la signature effective.
Le projet actuel prévoit que les forces indiennes reçoivent leurs 18 premiers avions de combat, produits en France, sous 36 à 48 mois. Les 108 autres seraient fabriqués sur les sept années suivantes en Inde par HAL, dans le cadre d'un transfert de technologie par Dassault. Le Times of India croit savoir malgré tout que les rivaux écartés du processus continuent à s'efforcer d'empêcher l'accord. Le Royaume-Uni et l'Allemagne auraient par exemple récemment tenté de rappeler l'Eurofighter Typhoon à l'attention du gouvernement indien, tandis que les Etats-Unis prépareraient le terrain pour relancer le F/A18 Super Hornet ou le F-16 Super Viper avant la visite officielle du premier ministre indien à Washington en septembre. Quand on sait les pressions formidables, et malheureusement jusqu'ici couronnées de succès, faites par les Etats-Unis sur les pays précédemment intéressés par le Rafale, lequel est et restera longtemps le meilleur avion de combat à ce jour, il n'est pas étonnant que les Américains fassent tout pour faire avorter le projet de contrat Rafale en Inde.
Enjeux d'un contrat Rafale entre l'Inde et la France
Concernant ce projet de contrat, il ne concerne pas que le seul Rafale en son état actuel. Comme l'écrit un de nos correspondants, les conséquences du refus de livrer le Mistral à la Russie seraient absolument dramatiques pour le contrat Rafale en Inde. Nicolas Sarkozy alors président, avait déjà sabordé le contrat brésilien lorsqu'il torpilla sous les pressions américaines l'accord obtenu sur le dossier iranien par la médiation du Brésil et de la Turquie.
Aujourd'hui, selon des sources non officielles, les Indiens repoussent la signature du contrat MMRCA jusqu'à la livraison des Mistral pour juger du degré d'autonomie de la France vis-à-vis de l'Amérique, et de sa fiabilité en tant que partenaire stratégique de premier plan dans les domaines technologiques et militaires sur les 30 prochaines années, comme le contrat en jette les bases.
Notre correspondant rappelle que ce contrat représentera le plus extraordinaire transfert de technologies entre deux nations depuis l'aide soviétique à la Chine au début des années 1950. Les enjeux sont considérables. Un partenariat tel que celui qui se dessine entre la France et l'Inde, fera que la France partagera un standard technologique avec l'Inde pendant des décennies. Indiens et Français travailleront de concert à son amélioration (par exemple pour le Mid Life Upgrade de la plateforme prévu en 2025). Probablement ils continueront à mener des projets aéronautiques communs sur bien d'autres plateformes civiles et militaires.
Mieux, l'intégration de la chaine de production indienne à la chaine française permettrait de diminuer considérablement le prix de l'appareil (sans parler de l'intérêt à produire en zone roupies, surtout lorsque le dollar ne sera plus l'étalon d'échange international) et gagner ainsi de nombreux marchés, venant notamment des pays du BRICS. Les nouveaux développement seront cofinancés et amortis sur de plus importantes séries, moyennant quoi le plan de charge des bureaux d'étude indiens et français les plus avancés seront garantis pendant 30 ans, au prix peut-être d'une légère spécialisation de part et d'autre. Ajoutons que dans le cas du Rafale, la part de la valeur ajoutée d'origine anglo-saxonne dans l'appareil est presque nulle. Elle ne concerne aucun équipement critique que l'Inde et la France ne puissent produire seules.
Pour en revenir au Mistral
Il reste deux mois d'ici à la livraison. Les pressions sur la France deviennent extrêmement fortes. François Hollande et le gouvernement français auront-ils le courage de résister ? Il y a déjà 2 jours, alors que la tragédie de la Malaysia Airlines venait de se produire, voici ce qu'écrivait le journal d'inspiration gouvernementale américain The Diplomat, «After MH17, France Must Cancel Sale of Warships to Russia. Instead of selling Russia two Mistral-class warships, France should sell them to the U.S. Navy». Après avoir rendu hommage aux technologies militaires françaises, le journal, reprenant l'argumentaire de la diplomatie américaine, affirme que le devoir de la France (comme membre éminent de l'Otan) est de vendre les Mistral à la marine américaine. D'autres contrats pourraient s'ensuivre, au profit des chantiers français. Cette dernière perspective est risible, lorsque l'on connait l'âpreté du lobby militato-industriel américain à ne pas laisser un dollar d'argent public échapper aux dits industriels américains.
Bref, pour conclure, un refus français de livrer les Mistral à la Russie obscurcirait brutalement l'avenir de la technologie et du savoir-faire aéronautique et électronique français et compromettrait notre indépendance technologique et militaire. Ceci notamment dans la perspective des négociations de la France avec l'Inde au sujet du Rafale.
Plus généralement, l’avenir concret des futurs rapprochements euroBRICS, que nous recommandons ici, serait compromis. Dans de telles perspectives, comment les pays du groupe des BRICS pourraient-ils faire à l’avenir confiance tant à la France qu’à l’Allemagne voire à d’autres États européens, si ces pays se comportent comme de simples pions manipulés par les États-Unis, lesquels ont pour seul but de faire échouer de tels rapprochements ?
Jean-Paul Baquiast
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Source : Dedefensa.org via Leschroniquesderorschach
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