Le référendum d'initiative « populaire » voté mais toujours inapplicable...

C'est dingue, pour une fois qu'un truc pourrait tourner à notre avantage, ils en profitent pour le retourner contre nous. De la démocratie, mais pas trop, hein !... On n'est pas en Suisse...

referendum_populaire_23_11_2013.jpg
Le référendum d'initiative populaire n'aboutira jamais... à un référendum | AFP

RÉFÉRENDUM - C'était une consigne présidentielle. Les deux projets de loi sur le référendum d'initiative populaire promis par François Hollande ont obtenu le feu vert du Parlement ce jeudi 21 novembre, rendant théoriquement possible l'organisation d'une consultation à l'initiative des citoyens. La réparation d'un oubli du précédent quinquennat qui avait inscrit ce dispositif emblématique dans la Constitution sans faire voter la loi d'application qui le rendrait possible.

Déjà votés mardi à l'Assemblée, les deux textes ont été approuvés par les sénateurs par 326 voix pour, tandis que les 20 sénateurs du groupe communiste, républicain et citoyen (CRC) ont voté contre.

Sur le papier, un nouveau droit est donc désormais ouvert aux citoyens français : "à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement", une proposition de loi pourra être soumise à une consultation populaire et devra recueillir le soutien d'un "dixième des électeurs" pour s'imposer dans le calendrier législatif. Si le Parlement ne se saisit pas de la question dans un délai qui reste à définir, le président de la République est alors tenu de convoquer un référendum.

Une chance pour les défenseurs du droit de vote des étrangers qui militent (en vain) pour une révision constitutionnelle ? Pas du tout. Car le scénario d'un référendum d'initiative populaire "n'arrivera probablement jamais", prévient le président socialiste de la Commission des Lois à l'Assemblée, Jean-Jacques Urvoas.

Explications.

Un référendum partagé et non populaire

En réalité, le dispositif inscrit dans la Constitution n'a rien d'un référendum populaire : l'initiative appartient ici aux élus qui devront ensuite obtenir une caution populaire (exceptionnelle, nous y reviendrons) pour s'autosaisir d'une proposition de loi. Si au moins 185 parlementaires (1/5e du Parlement) ne proposent pas un texte de loi, ni les ONG ni les citoyens n'auront voix au chapitre.

Ce dispositif s'apparente ainsi d'avantage à une arme destinée à l'opposition plutôt qu'à un outil de démocratie participative. C'est pourquoi le dispositif a été renommé par les parlementaires "référendum d'initiative partagée".

Un outil qui n'a rien à voir avec les voies référendaires "populaires" qui existent ailleurs. La Suisse, l'Italie et la Californie octroient ainsi un véritable pouvoir législatif au peuple et notamment un pouvoir de veto. A la demande de 500.000 électeurs en Italie, de 50.000 électeurs en Suisse, et d'un nombre d'électeurs égal à 5 % des personnes ayant participé à la dernière élection du gouverneur en Californie, ce qui représente environ 400.000 électeurs, un référendum d'abrogation peut être convoqué dans ces Etats respectifs. 100.000 électeurs suisses suffisent pour réclamer un référendum constitutionnel.

Une pétition totalement inatteignable

Si tant est que le processus soit enclenché par les élus, les chances de réunir les signatures nécessaires sont "quasiment impossibles", tranche le constitutionnaliste Pascal Jan. La Constitution exige en effet qu'un électeur inscrit sur les listes électorales sur dix appuie une initiative pour qu'elle s'impose au Parlement. Soit... 4,5 millions de signatures.

Or, de mémoire d'ONG ou de syndicat, personne ne se souvient d'une pétition capable de réunir autant de voix. Même à l'échelle de l'Europe. La pétition européenne contre l'Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA) n'a ainsi recueilli "que" 2,5 millions de paraphes en mai 2012. En France, la pétition "monstre" de la Manif pour tous adressée au Conseil économique et social n'avait mobilisé "que" 700.000 signataires.

Autre exemple, en 2008, la pétition contre la privatisation de La Poste, qui avait mobilisé tous les syndicats de France, n'avaient obtenu que 308.245 signatures. A ce jour, la pétition contre le droit de vote des étrangers lancée par l'UMP n'a mobilisé que 204.000 personnes, soit moins que le nombre d'adhérents du parti d'opposition.

Blocage parlementaire en vue

Hypothèse d'école : imaginons que, par miracle, les défenseurs du droit de vote des étrangers obtiennent les signatures nécessaires. La proposition de loi reviendrait alors au Parlement qui devra s'en saisir dans des délais précis (qui seront définis dans le projet de loi organique), faute de quoi un référendum devrait être convoqué par le président de la République.

Problème : l'article inscrit dans la Constitution prévoit un autre obstacle majeur pour éviter le recours au référendum. Le texte prévoit qu'un référendum est convoqué uniquement "si la proposition de loi n'a pas été examinée par les deux assemblées" dans le délai prescrit. En clair, "il suffira aux deux chambres d'examiner - même pas de le rejeter - le texte pour que la voie référendaire s'écroule", explique au HuffPost le député socialiste Jean-Jacques Urvoas, président de la Commission des Lois.

"S'il est interprété au sens propre, le terme 'examiner' interdit de fait tout référendum", confirme le constitutionnaliste Pascal Jan, non sans évoquer la possibilité (infime) que la loi organique ne précise l'emploi de cette expression.

Faute d'une nouvelle révision constitutionnelle, les partisans du droit de vote des étrangers comme des autres causes perdues de la révision constitutionnelle, devront se tourner vers d'autres cieux institutionnels pour imposer leur loi à leurs élus.

 

Source : Huffingtonpost.fr

Informations complémentaires :

 

Inscription à la Crashletter quotidienne

Inscrivez vous à la Crashletter pour recevoir à 17h00 tout les nouveaux articles du site.

Archives / Recherche

Sites ami(e)s