Les secrets de fabrication des «carnets de guerre» de WikiLeaks

Les dessous du scoop de Wikileaks, qui promet d'avoir évincés tous documents pouvant mettre en danger la sécurité des Etats Unis... ou de personnes physiques, soit 15 000 documents qui restent à l'abri avec Julian Assange, qui se veut être avec Wikileaks une "Agence d'information du Peuple", et c'est bien parti...

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Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks, le 26 juillet 2010 (REUTERS/Andrew Winning)

La guerre ordinaire en Afghanistan. Embuscades, bombes artisanales, échanges de tirs entre soldats «amis», corruption... la publication par le site WikiLeaks et trois titres mondialement connus (New York Times, Guardian et Spiegel) des «carnets de guerre» du conflit afghan passionne. Retour sur les secrets de fabrication de ce scoop à grande échelle.

L'ampleur de la fuite

Pour de nombreux observateurs, il s'agit de la plus grande fuite de l'histoire militaire, plus importante encore que l'affaire des «papiers du Pentagone» en 1971. Les autorités américaines savaient d'ailleurs qu'elles avaient été victimes d'une fuite majeure.

Au total, 92.201 fichiers, datant de janvier 2004 à décembre 2009, ont été mis en ligne sur WikiLeaks. Ils proviennent notamment de l'ambassade américaine à Kaboul. Ces rapports de routine sont «utilisés par des officiers du Pentagone et par les troupes sur le terrain». Pour le Guardian, ils soulignent le «fossé entre un compte-rendu soigneusement policé pour les opinions publiques et la réalité bien plus compliquée du terrain»

Le mode opératoire

WikiLeaks aurait-il atteint l'âge de raison? C'est ce que semble penser Blake Hounshell, dans un billet traduit par le blog Déclassifiés. Le site, fondé en 2006, se veut «la première agence de renseignement du peuple». Il avait déjà défrayé la chronique en mettant en ligne début avril la vidéo d'une bavure de l'armée américaine en Irak.

Critiqué pour sa propension à publier des informations «brutes» et manquant de mise en perspective, WikiLeaks a cette fois travaillé de concert avec trois grand journaux, de trois pays différents, engagés dans la guerre en Afghanistan. Le site prend contact, il y a quelques semaines, avec les rédactions concernées et leur fournit l'intégralité des données à sa disposition.

Les journalistes du New York Times ont ainsi pu enquêter un mois sur le dossier, vérifier les informations, démêler l'essentiel de l'anecdotique. L'accord avec WikiLeaks prévoit aussi une publication simultanée. Elle a lieu ce lundi. Chacune des rédactions a pu effectuer un travail de mise en valeur des données, souvent arides.

Cette stratégie permet à WikiLeaks de jouer sur deux tableaux: elle donne d'abord un retentissement bien plus important à son travail, mais lui permet également de se «protéger» des remontrances de l'administration américaine. Au final, note le Washington Post, on perçoit une «puissance et une sophistication grandissante du site». Celui-ci, rappelons-le, était au bord du dépôt de bilan il y a quelques mois.

Quid des informations sensibles?

WikiLeaks assure avoir pris toutes les précautions pour ne pas mettre en danger de vies humaines. Les noms de personnes dont l'identité devait être protégée ont été effacés et près de 15.000 documents n'ont pas été mis en ligne.

De même, seule une partie des 92.000 fichiers a été reprise par les trois journaux. Quand des éléments mettaient en danger la «sécurité nationale», ils n'ont été publiés que partiellement. Si les données sont classées au rang de «secret», elles ont un «niveau de sécurité relativement faible», relève le Guardian.

Quelles réactions?

WikiLeaks est un «ennemi» bien connu de l'administration américaine. Dès 2008, la CIA écrivait: «WikiLeaks représente une potentielle menace pour l'armée américaine [...], ses informations pourraient être de grande valeur pour les insurgés étrangers et groupes terroristes planifiant des attaques contre le pays et ses ressortissants». Quant au soldat responsable de la fuite sur la bavure de 2007 en Irak, il a déjà été inculpé.

Sans confirmer ni démentir la véracité des documents, les Etats-Unis n'ont pas manqué de «condamner fermement la publication d'informations confidentielles par des personnes et des organisations qui pourraient mettre en péril la vie d'Américains et de nos alliés, et menacer notre sécurité nationale». L'ambassadeur du Pakistan aux Etats-Unis a lui jugé «irresponsable» la publication des documents confidentiels, les qualifiant même de «rumeurs».

De son côté, Julian Assange, fondateur de WikiLeaks et militant contre la guerre en Afghanistan, a affirmé que «le bon journalisme est controversé par nature». L'homme, qui vit quasi-caché et à qui ses avocats recommandent de ne pas se rendre aux Etats-Unis, invoque l'intérêt du public pour justifier la publication des fichiers: «Ils montrent non seulement les événements graves mais aussi le côté sordide de la guerre, de la mort d'un enfant aux opérations majeures qui tuent des centaines de personnes.»

«Il revient à un tribunal de dire clairement si on est en présence ou non d'un crime. Cela dit, à première vue, il semble qu'il y ait des preuves de crimes de guerre dans ces documents», a-t-il déclaré.

Source : Libération.fr


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