Majorité étriquée à gauche pour le traité européen

Comme le faisait remarquer un récent article :

« Une erreur ne devient pas une vérité en raison de sa propagation multipliée, ni la vérité ne devient une erreur parce que personne ne la voit. »

                        - Mahatma Ga

TSCG_vote.jpg

PARIS (Reuters) - Le gouvernement français a réussi de justesse mardi son premier test d'autorité en obtenant à l'Assemblée nationale une majorité de gauche en faveur du traité budgétaire européen, sept ans après les déchirements du "non" à la Constitution européenne.

Mais le travail de persuasion et les rappels à l'ordre de l'exécutif n'ont pas permis de convaincre 29 députés socialistes, qui se sont abstenus ou ont voté contre un texte qu'ils perçoivent comme un carcan d'austérité.

Si Angela Merkel a dû compter à huit reprises sur les voix de l'opposition pour faire adopter des textes européens par le Bundestag, François Hollande, dont les sondages de popularité sont en chute libre, voulait éviter à tout prix de devoir la ratification du texte à l'UMP.

Les députés français ont finalement adopté par 477 voix contre 70 le projet de loi qui autorise la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l'Union économique et monétaire.

François Hollande en a donné le crédit au travail de persuasion de son Premier ministre, Jean-Marc Ayrault.

"Cette majorité ample donnera à la France une capacité pour faire entendre sa voix supplémentaire, c'est-à-dire nous permettra d'avancer sur la réorientation de l'Europe que j'ai engagée depuis mon élection", a déclaré le président en marge de la réception du chancelier autrichien, Werner Faymann.

Au groupe PS, 264 députés ont voté pour, 20 contre et neuf se sont abstenus, tandis que trois écologistes seulement votaient pour, 12 votant contre et deux s'abstenant.

La gauche rassemble donc 282 voix, permettant de justesse la ratification du texte sans les voix de l'UMP, dont 167 élus ont voté pour.

La pression a pourtant été maximale sur les députés socialistes pour éviter une nouvelle division du PS, qui s'était déchiré en 2005 et un affaiblissement de l'autorité de François Hollande déjà mise à mal par les écologistes, autorisés à rester au gouvernement malgré leurs positions sur l'Europe.

Le ministre des Affaires européennes, Bernard Cazeneuve, partisan du "non" à l'époque", s'est démené pour amener un à un les députés de la majorité à serrer les rangs autour du gouvernement et à refuser une victoire facile à la droite.

Jean-Marc Ayrault a dû admettre fin septembre que le traité n'avait pas été "juridiquement renégocié", malgré la promesse de François Hollande qui affirme avoir obtenu un pacte de croissance de 120 milliards d'euros.

DRAMATISATION DES ENJEUX

Mais une fois fait cet "aveu", qui a réjoui les députés UMP soucieux d'insister sur le fait que pas une ligne du traité négocié par Nicolas Sarkozy n'avait été changée, il avait dramatisé les enjeux pour mobiliser les députés socialistes.

"Prendre une responsabilité de l'aggravation de la crise, une crise politique mais aussi une crise de la zone euro, serait prendre une responsabilité face à l'Histoire", a-t-il dit début octobre devant les radicaux de gauche. "L'ambiguïté en disant 'non', c'est aussi engager la sortie de l'euro".

Le président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, Bruno Le Roux, a parachevé la manoeuvre en organisant le 2 octobre un vote à main levée sur le traité lors d'une réunion interne - dix députés PS avaient voté contre à cette occasion - avant d'adresser une lettre comminatoire à tous les députés.

Il y rappelait les 297 députés PS et apparentés à la discipline de vote, tout en soulignant que ce serait "la cohérence et la cohésion de la majorité qui seront observées dans un vote où la gauche doit être majoritaire".

A l'arrivée, la manoeuvre n'a guère porté ses fruits puisque les députés PS qui avaient manifesté leur opposition au traité l'ont confirmée lors du vote de mardi.

Outre un test d'autorité pour la majorité, il s'agissait pour le gouvernement de démontrer à ses partenaires européens que la France est totalement déterminée à respecter ses engagements de discipline budgétaire et son objectif d'un déficit public limité à 3 % du PIB en 2013.

NOUVEAUX EFFORTS BUDGÉTAIRES ?

La cohésion du parti majoritaire risque en effet d'être mise à rude épreuve dans les prochains mois puisque le Fonds monétaire international (FMI) a prévu pour l'an prochain une croissance limitée à 0,4 % en France, un chiffre inférieur de moitié à l'objectif affiché par Paris.

L'organisation estime en conséquence que le déficit français s'élèvera à 3,5 % l'an prochain à politique constante.

Pour tenir le cap des 3 % en 2013, des mesures supplémentaires devraient s'imposer par rapport aux 30 milliards d'impôts nouveaux et de réductions de dépenses prévues dans le budget 2013, sauf à renier les engagements du gouvernement.

Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire (TSCG) élaboré par Nicolas Sarkozy continue néanmoins à faire débat.

La présidente du Front national, Marine Le Pen, entend bien capitaliser sur la montée du sentiment anti-européen en France et marquer ainsi sa différence par rapport à l'UMP.

"C'est un acte de haute trahison", a-t-elle dit à propos du vote des députés qui, selon elle, enferme la France dans un carcan d'austérité sans fin.

L'argument est différent à la "gauche de la gauche", qui avait mobilisé 40.000 manifestants contre le traité le 30 septembre à Paris, mais les députés du Front de gauche et d'Europe Ecologie-Les Verts restent hostiles à la construction européenne actuelle, même réformée.

Yves Clarisse, édité par Gilles Trequesser

Source : Reuters

Informations complémentaires :

 

Inscription à la Crashletter quotidienne

Inscrivez vous à la Crashletter pour recevoir à 17h00 tout les nouveaux articles du site.

Archives / Recherche

Sites ami(e)s