Bruxelles soupçonne la députée d'avoir salarié avec l'argent européen deux assistants parlementaires qui travaillaient en réalité pour le Front national.
Bruxelles a Marine Le Pen dans le collimateur. L'organisme antifraude de l'Union européenne (Olaf) réclame près de 340.000 euros à Marine Le Pen, une somme que l'eurodéputée a perçue pour rémunérer deux assistants qui n'auraient en réalité travaillé que pour le Front national, ont indiqué lundi des sources concordantes à Bruxelles.
L'Olaf a ainsi demandé le 2 août au Parlement européen de recouvrer 339.946 euros, somme correspondant aux salaires versés à deux assistants parlementaires de Marine Le Pen, Thierry Légier et Catherine Griset, selon une source parlementaire et une source proche de l'enquête, confirmant une information de deux organes de presse français, le site Mediapart et l'hebdomadaire Marianne.
Pas d'observations de la part du FN
Thierry Légier a perçu ces salaires en 2011 et Catherine Griset de 2010 à 2016. La présidente du FN « aurait mal utilisé cet argent pour payer deux assistants qui devaient travailler à Bruxelles dans le cadre de l'activité parlementaire, et pas pour autre chose au siège du Front national », a relevé la source parlementaire. Le 30 septembre, le PE a donné quatre semaines à Marine Le Pen pour faire des observations, mais celle-ci n'a à ce jour pas répondu, d'après la source proche de l'enquête. « Nous n'avons pas répondu au courrier du Parlement, car on ne nous a toujours pas communiqué le rapport d'enquête de l'Olaf », a déclaré à l'Agence France-Presse l'avocat de Marine Le Pen, Marcel Ceccaldi, ajoutant qu'il déposerait un recours devant la Cour de justice de l'UE pour l'obtenir.
« Comment peut-on séparer le travail d'assistant d'un député européen et ses activités auprès de la présidente d'un grand parti politique ? Les questions européennes et les questions sociétales françaises comme les flux migratoires ou l'espace Schengen sont intimement liées », a-t-il avancé, dénonçant une « manœuvre » pour « gêner l'action de Marine Le Pen au Parlement européen » et « tenter de lui faire du tort avant la présidentielle » de 2017 en France. Le vice-président du Front national Florian Philippot a fait des remarques similaires : Marine Le Pen, « elle est en même temps présidente du Front et eurodéputée, que ça plaise ou pas aux eurocrates, aux européistes. Moi, je ne sais pas différencier », a-t-il dit sur la chaîne de télévision française BFM TV.
« L'arbitraire » de l'UE
Il a également dénoncé l'« arbitraire » de l'Union européenne, alors que lundi le comité d'éthique de l'UE a estimé que l'ancien président de la Commission José Manuel Barroso n'avait pas violé les règles « d'intégrité et de réserve » de l'UE en acceptant un poste à la banque d'affaires Goldman Sachs. « Cette Union européenne, c'est le règne de l'arbitraire, elle est douce avec les copains, avec les européistes, et elle est impitoyable avec ses adversaires (...), ceux qui mettent en cause son emprise », a dit Florian Philippot.
Pour ce qui est de Marine Le Pen, l'Olaf a simplement confirmé avoir bouclé son enquête administrative en juillet. Le président du Parlement Martin Schulz (social-démocrate) avait saisi l'organisme antifraude en mars 2015 après avoir constaté que la direction nationale du FN reprenait dans son organigramme quatre assistants accrédités (à Strasbourg ou à Bruxelles) et seize assistants locaux (dans les circonscriptions). Parmi les assistants locaux concernés, dix ont conclu un contrat de travail qui indique comme adresse d'exécution celle du siège du FN, notait à l'époque le Parlement.
Dans un volet séparé, une enquête judiciaire a été ouverte à Paris sur ces soupçons d'irrégularités. Un dossier similaire concerne le père de Marine, Jean-Marie Le Pen, qui siège au Parlement en tant que « non inscrit ». L'UE lui réclame 320.026 euros qui lui auraient été « indûment » versés pour rémunérer son assistant parlementaire, Jean-François Jalkh, entre 2009 et 2014.
Source : Le Point.fr
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