Obligation vaccinale pour les soignants : "On ajoute de la coercition à des professions déjà très difficiles" (Marianne.net)

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Après qu'ils aient sauvé tant de Français(es) et pris des risques incroyables quand il n'y avait pas les équipements, voilà comment le gouvernement remercie les soignants.

Et comme on l'a vu, Emmanuel Macron est hors la loi.

Rappel : L’obligation vaccinale n’aurait aucune justification, ni scientifique ni légale (Gérard Delépine)

Par Jean-Loup Adenor

Emmanuel Macron a annoncé, ce lundi 12 juillet au soir, que la vaccination deviendrait obligatoire pour les professionnels de la santé et les personnes en contact avec des publics fragiles. Comme en Italie, les récalcitrants risquent de voir leur contrat de travail suspendu pour quelques semaines, le temps de se mettre en conformité, une « première étape » avant « une mise à pied ». Marianne s'est entretenu avec ces soignants, dont certains se sentent pointés du doigt pour de mauvaises raisons.

 Autour de moi, beaucoup sont déçus et énervés par la communication du gouvernement. Des collègues se demandent ce qu'ils vont faire, certains se feront vacciner, mais presque autant disent qu'ils ne viendront plus travailler au 15 septembre », déplore Noémie Banes, ancienne infirmière urgentiste aujourd'hui cadre de santé à l'hôpital et présidente du Collectif inter urgences. Pour les professionnels de santé interrogés par Marianne, la nouvelle de l'obligation vaccinale à destination des soignants et des personnes travaillant avec un public fragile n'est pas vraiment une surprise.

Tous regrettent, en revanche, la méthode choisie par Emmanuel Macron : pas de réelle consultation, mais une obligation. « Ce ne sont pas véritablement les annonces d’hier soir qui choquent les professionnels de santé, mais plutôt le fait d'être pointés du doigt, abonde Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI CFE-CGC. Il y a quelques mois, nous étions les héros du quotidien, aujourd'hui nous sommes les parias qu'il faudrait chasser et vacciner de force. »

Au bout d'un an et demi d'épidémie et d'hésitations quant aux meilleurs outils de sortie de crise, une partie des soignants admet être aussi perdue que la population générale. « D'un jour à l'autre, on entend une vérité et son contraire. Sur les masques qui ne servent à rien, puis sont obligatoires, sur la vaccination qui ne sera jamais obligatoire, puis qui le devient progressivement… Certains professionnels de santé n'ont plus confiance dans le gouvernement », estime notamment Noémie Banes.

Ce manque d'information et ce besoin d'accompagnement, beaucoup estiment qu'il aurait pu être géré au sein même de l'hôpital ou des structures de santé, sans passer par une obligation. « Là où il y a eu des réunions d'explication sur les vaccins, qui ont été organisées à l'initiative des soignants, on s'est rendu compte que ça réglait beaucoup de choses. On a eu des taux de vaccination proches de 100%. Comme pour tout le monde : il faut apporter des informations et répondre à nos questions. »

La médecine libérale peu inquiétée

Le docteur Jérôme Marty, médecin libéral et membre de la Confédération des syndicats des médecins français, regrette que le gouvernement n'ait pas rendu obligatoire ces réunions d'information et de discussions autour de la vaccination. « On avait demandé une circulaire en ce sens dès février. Quand on met à plat tous les arguments, on a de biens meilleurs scores de vaccination. Quand vous discutez avec les gens, vous obtenez des résultats », estime-t-il. Pour autant, le médecin n'est pas hostile à ce que la vaccination des soignants fasse l'objet d'une contrainte :  « Je me serais satisfait d'une amende pour non-vaccination, sur le modèle de la limitation à 80km/h. On a les listes des gens vaccinés, on aurait pu vérifier. La vaccination ne se comprend que dans la perspective d'une lutte collective et sociétale, l'individualisme n'a pas sa place. À ce titre, nécessité fait loi », assume-t-il.

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Chez ses confrères libéraux, le doute porte davantage sur les modalités d'application : « On ne voit pas bien quels moyens de rétorsions ils auraient sur nous. D'autant que, dans la médecine libérale, on est vaccinés à 90%. En réalité, On voit cette obligation plutôt d'un bon œil car il fallait avancer. »

En attente de décisions concrètes

Pour Estelle Bastiani, gérante d'une entreprise de services à la personne qui emploie des auxiliaires de vie, cette obligation vaccinale est une décision cohérente. « Nos clients demandent à être rassurés là-dessus, on a déjà eu des appels ce matin pour savoir si elle était effective immédiatement », explique-t-elle. Jusqu'ici, la cheffe d'entreprise a tâché de ne pas être trop intrusive sur la situation vaccinale de ses salariés. « Certains m'avaient informée de leur choix, d'autres pas. Avec cette nouvelle mesure, je vais être obligée de faire un bilan et de faire un point avec ceux qui ne sont pas encore vaccinés. » Les délais sont assez courts : pour que la date du 15 septembre soit respectée, il faut que la première injection ait eu lieu avant la fin juillet.

Ce qui préoccupe Estelle Bastiani, c'est plutôt la façon dont elle devra faire respecter concrètement cette obligation. « On attend vraiment des décisions et des annonces concrètes. J'ai entendu ce matin que la personne qui refuse de se faire vacciner ne pourra pas travailler et ne sera pas payée… Mais j'attends de ma fédération et du gouvernement une boîte à outils concrète pour savoir comment faire. » Elle admet aussi qu'humainement, les prises de décisions pourront être compliquées. « Suspendre le contrat de travail d'un salarié qui ne voudrait pas se faire vacciner, leur dire qu'ils ne pourront pas travailler, ça va créer des situations extrêmement tendues avec nos personnels. On est déjà dans une situation de sous-effectif. »

La fuite des soignants

Car le risque de cette nouvelle obligation vaccinale pour les soignants, c'est de renforcer la tension qui pèse déjà fortement sur des métiers où les candidats manquent, comme chez les aides-soignants. « Ils sont dans des métiers qui ont de fortes contraintes, on travaille un week-end sur deux par exemple, on est très mal rémunérés. Ce sont des gens qui, sans cette problématique vaccinale, peuvent déjà être en rupture par rapport à leur métier. Alors on rajoute de la coercition à des professions déjà très difficiles », explique le docteur Luc Duquesnel, président de la Confédération des syndicats médicaux français.

Même son de cloche chez les infirmiers : « Le véritable problème aujourd'hui, ce ne sont pas tant les mises à pied de soignants, qui seront très minoritaires. Le problème, c’est une nouvelle vague de départs des infirmiers du fait de la dégradation de leurs conditions de travail », regrette Thierry Armouroux.

Selon le syndicaliste, le nombre de départs dans la profession serait passé de 7500 en juin 2020 à 34.000 infirmiers en septembre de la même année. « Les personnels sont épuisés et particulièrement frustrés de voir que, même en pleine pandémie, on continue à fermer des postes de soignants. Et c'est un cercle vicieux : plus les gens quittent la profession, plus les conditions de travail de ceux qui restent se dégradent. »

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Source : Marianne.net

 

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