On a tous un peu d’argent dans les Iles Caïmans

J'avais évoqué la question en ce qui concerne les cotisations de retraites complémentaires dans le privé, auxquelles l'État nous pousse à souscrire, ce qui fait de nous des complices du système... Pour nos vieux jours... : (((

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Raies aux iles Caïmans

Le trésorier de campagne de François Hollande, Jean-Jacques Augier, n’est pas le seul à avoir de l’argent aux Caïmans. Nous aussi. Vous aussi. Si si, vous allez voir.

Pour Gabriel Zucman, chercheur à l’Ecole d’économie de Paris, la question ne se pose même pas :

« Nous sommes tous un peu clients, indirectement, des Iles Caïmans. Toutes les institutions financières françaises – banques, compagnies d’assurance, etc. – font toutes du business avec ces îles. »

L’explication est simple. Les institutions financières françaises placent l’argent de leurs clients dans différents produits pour diversifier les risques. Et, dans ces portefeuilles de placements, se trouvent quasi systématiquement :

  • des « hedge funds », ces fonds spéculatifs adeptes d’un recours massif à l’endettement ;
  • des actions de sociétés américaines.

35 milliards de dollars « français »

Or les fonds spéculatifs sont enregistrés pour la plupart aux Iles Caïmans – le pays est leader en la matière.

Et de nombreuses sociétés américaines sont domiciliées aux Iles Caïmans, elles y ont placé leur siège social (les entreprises européennes, elles, préfèrent les Pays-Bas). C’est une situation que Barack Obama dénonçait d’ailleurs durant sa campagne de 2008, rappelant qu’un bâtiment (le Ugland House Building) servait à lui seul de boîte aux lettres à plus de 1 200 sociétés américaines.

Les Caïmans sont le sixième centre financier mondial, selon les données de la Banque des règlements internationaux.

La France y possède 35 milliards de dollars en titres financiers, selon les derniers chiffres du Fonds monétaire international (FMI) :

  • 14 milliards en actions (dont les hedge funds),
  • 21 milliards en obligations.

Mon assurance vie sous le soleil

La probabilité qu’une partie de mon argent se trouve aux Caïmans est particulièrement forte si j’ai souscrit des parts d’une société d’investissement à capital variable (Sicav) (ou d’un autre organisme de placement collectif en valeurs mobilières, OPCVM) – c’est souvent le cas des titulaires d’assurances vie.

Et si le client choisit dans ces cas-là la composition de son panier (actions françaises, actions de pays émergents, obligations, etc.), il ne le fait qu’en fonction des informations dont la société de gestion dispose. Or, les systèmes financiers sont tellement interconnectés, qu’il est vite difficile de savoir qui est qui.

La moitié des Sicav détenues en France se trouvent ainsi en fait au Luxembourg, indique le journaliste Xavier Harel, auteur de « La Grande Evasion » (éd. Les Liens qui libèrent, janvier 2010) :

« Il y a des milliers de Sicav différentes, donc forcément, à un moment, il y a de fortes chances pour que ça passe par les Iles Caïmans. »

Rappelons que 62% des Français possèdent une assurance vie, selon les données de l’Insee. Et 19% possèdent des placements risqués comme les actions, les Sicav ou d’autres OPCVM. Ce sont eux qui ont le plus de « chances » d’avoir de l’argent aux Caïmans.

Mon compte en banque n’est pas épargné

subprime_06_04_2013.jpgSi je n’ai pas d’assurance vie, pas de Sicav, juste un compte en banque classique, je ne suis pas pour autant épargné.

Le rôle des banques étant de prêter de l’argent, une partie des sommes que j’y dépose est prêtée à d’autres clients. Or, parmi ses clients, la banque peut très bien compter un Jean-Jacques Augier, dont je finance ainsi très indirectement les activités aux Iles Caïmans, comme le remarque Xavier Harel.

Surtout, les grandes banques effectuent des opérations spéculatives avec leur argent, qui est, en partie, le nôtre.

Plus d’une a ainsi frôlé la faillite lors de la crise financière. La Grande-Bretagne a du coup adopté un ensemble de dispositions en vertu desquelles les banques devront séparer les deux activités afin de mieux protéger leur clientèle en cas de nouvelles crises.

La France de François Hollande a fait semblant de l’imiter. Mais la réforme finalement votée n’a pas été à la hauteur de la promesse.

Certes, les banques françaises ont fortement réduit leurs activités spéculatives, pour fonds propres, depuis la crise, signale l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP) : les autorités de régulation les ont rendues plus coûteuses . Il n’en reste pas moins toujours possible de les pratiquer.

Des produits hors paradis fiscaux ?

Mettre fin à ce système ne serait pas très compliqué selon Xavier Harel :

« Il suffit que les autorité décident qu’il est désormais illégal d’avoir une relation avec une entreprise dont on ne peut pas connaître les bénéficiaires. C’est la manière la plus simple de viser les paradis fiscaux. »

Mais pour l’instant, seules quelques banques, comme le Crédit Coopératig ou la NEF, garantissent des placements hors paradis fiscaux, et sans spéculation.

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« La Grande Évasion » de Xavier Harel, éd. Les Liens qui libèrent, janvier 2010

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Source : Rue89.com

Informations complémentaires :

 

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