Paul Jorion revient sur les subprimes, trois ans après

Encore une fois on apprend que rien n'a changé, same player shoot again. Alors que les responsables sont clairement identifiés, aucune action n'est entreprise contre eux, où est la justice dans ce monde ? Des fois j'ai envie de hurler...

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La Tribune, « Rien n’a véritablement changé », mercredi 18 août 2010

Auteur : Paul Jorion

Je réponds à quelques questions d’Eric Benhamou sur le thème : « Les subprimes, trois ans après ».

Trois ans après l’éclatement de la crise financière, le procès des subprime a-t-il eu lieu aux Etats-Unis ?

Le marché des « subprime » n’existe plus car la plupart des établissements spécialisés ont été balayé par la crise et que plus aucune banque ne se risquerait aujourd’hui à accorder des crédits immobiliers risqués. Mais ce type de crédits peut renaître du jour au lendemain. Sur le plan de la réglementation, rien n’a véritablement changé. Il est bien question que les courtiers doivent se faire enregistrer et la toute nouvelle agence de protection des consommateurs, mise en place par la réforme financière, tentera, avec bien des difficultés sans doute, d’imposer des contrats clairs et lisibles de deux pages au lieu de ces fameux contrats de 32 pages qui ont ruiné tant d’emprunteurs. C’est bien peu au regard du séisme financier déclenché par les crédits subprime.

Une autre crise des subprime est-elle possible à l’avenir ?

Oui pour au moins deux raisons. Tout d’abord, rien n’a été fait pour limiter les dynamiques de bulles. Dans un contexte de bulle, la mécanique est toujours la même : les emprunteurs sont solvables tant que le prix de leur actif augmente, ce qui incite les banques à accorder des prêts très rémunérateurs qui nourrissent la bulle… jusqu’à son éclatement. Il existe une seconde raison, plus sociologique. Les Américains conservent toujours cette idée que les pauvres d’aujourd’hui peuvent être les riches de demain. Cette foi en l’avenir reste profondément ancrée dans une population majoritairement d’origine immigrée. Par nature, l’immigré croit en un système qui doit améliorer sa condition. Et quand tout va mal, ce n’est pas le système qui est mis en cause mais des boucs émissaires ou un hypothétique « complot ». C’est ce qui explique le succès des « tea parties », cette contestation extrémiste à Barack Obama qui déborde largement le camp républicain.

La recherche en responsabilité est donc impossible ?

Il y a quelques actions en justice, menées souvent à titre individuel par des procureurs. Les anciens dirigeants de Countrywide, l’ex numéro un du crédit immobilier aux Etats-Unis, sont toujours poursuivis par la SEC. Pourtant, les responsabilités auraient pu être facilement engagées, notamment à l’encontre de la « Mortgage Bankers Association » qui a dépensé des centaines de millions de dollars en lobbying pour convaincre les politiques de l’utilité des subprime. Pourtant, les dangers étaient connus et l’Etat de Caroline du Nord n’a pas hésité à interdire les subprime et d’éviter ainsi la crise immobilière. Ce n’est pas l’Etat qui a encouragé ces crédits, mais bien le système bancaire lui-même qui a su séduire les politiques avec un discours de lutte contre les discriminations.

http://www.pauljorion.com/blog/

Source : Weinstein Forcast Invest

 


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