Toulouse : Un congrès ? Non, un séminaire pour VRP déprimés !

Heureusement, quand même, qu'il y a Marianne pour tenter de nous faire sourire...

C'est un Parti socialiste déprimé qui s'est réuni pendant trois jours en congrès à Toulouse. Un rassemblement qui visait plus à remotiver les troupes qu'à s'adresser à des Français pourtant plus inquiets encore...

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(ALAIN ROBERT/APERCU/SIPA)

«Soyons fiers ». Voilà donc le slogan, quasi publicitaire, que tous les intervenants ou presque au congrès du Parti socialiste de Toulouse ont pris soin de répéter à la tribune. « Fiers », évidemment, d'avoir chassé Nicolas Sarkozy et cette « droite rance, petite, mesquine, qui court derrière le Front national », comme l'a décrite lors de son intervention Manuel Valls. « Fiers », surtout, disent-ils, du travail accompli depuis leur arrivée aux commandes du pays. À force de se dire « fiers », on doute que les socialistes le soient tant que ça. Comme si Toulouse n'était finalement pas un congrès politique, mais plutôt un séminaire de remotivation pour VRP d'une grande boîte profondément déprimés. Avec tous les exercices imposés : la petite vidéo projetée en salle plénière qui fait du bien au moral (et pour cause : elle oublie les défaites passées, celle de 2002 comme le « non » au référendum de 2005) ou les phrases qui, elles, ne font pas de mal (à l’image d’Harlem Désir qui réinterprète à sa sauce le fameux « mur de l’argent » en parlant de « mur du privilège et de la rente »). Toulouse a tout du séminaire pour représentants de commerce sur les rotules car les membres du PS savent pertinemment que leur produit phare, le hollandisme aujourd’hui au pouvoir, n'emballe pas les foules et perd même chaque jour des parts de marché. Quant à leurs principaux commerciaux, Francois Hollande et Jean-Marc Ayrault, les VRP en chef : ils ont la séduction du client-citoyen en berne...
 
Pendant ces trois jours passés enfermés sous la voûte de béton du Parc des expositions, les socialistes ont donc essayé de retrouver moral et mordant en répondant aux critiques de la concurrence : la droite. Ayrault serait un « amateur » ? Non, c’est un « honnête homme », « un homme de gauche qui est droit », l'a défendu Aubry. « Soutenons-le, il le mérite, il en a besoin ». D'ailleurs, le procès en amateurisme et en illégitimité que la droite intente aujourd’hui à la PME socialiste, « c'est ce que Léon Blum a entendu en 1936, ce que Francois Mitterrand a entendu en 1981, ce que Lionel Jospin a entendu en 1997 », a expliqué le patron des députés PS à l'Assemblée, Bruno Le Roux.
 
Jean-Marc Ayrault, lui-même, que certains membres de l’exécutif décrivent comme très « affecté » par la situation, a tenté de se regonfler auprès de ses petits camarades et de conserver son rang d’adjoint préféré du patron, en lançant un nouveau concept. Comme on lance un nouveau produit : avec un beau packaging. Ce produit de dernière génération censé redresser la courbe du PS qui n’a de cesse de flancher à la bourse de l’opinion, il l’a baptisé : le « nouveau modèle français ». Mais à bien y regarder, il n’a de « nouveau » que le nom. Car derrière cette appellation qui fait déjà sourire les socialistes (ils songent à la « nouvelle société » de Jacques Chaban-Delmas) se cache ni plus ni moins que le programme de François Hollande. Faire du neuf avec du vieux, pas sûr que cela fonctionne…
 
Mais les séminaires d’entreprises (fussent-elles politiques) sont aussi l’occasion pour chacun de dire ce qu’il a sur le cœur. Et à ce petit jeu-là ils sont quelques-uns à s’être livré publiquement. Ségolène Royal, d’abord. Très malignement, l’ex-candidate à la présidentielle de 2007 a servi un discours poli et respectueux, mais qui était, malgré toutes les précautions prises, une véritable leçon professée à l’attention de l’exécutif sur le thème « Nous l’avions dit, eh bien faisons-le » ! Il en va ainsi de la banque publique d’investissement pour laquelle Royal a demandé d’« [accélérer] le débat parlementaire ». Ou bien encore lorsqu’elle exhume des promesses du candidat Hollande que certains voudraient bien oublier maintenant qu’il est président comme la création d’une « agence publique de notation » au niveau européen. L’aile gauche du parti, aussi, a saisi l’occasion de dire à la tribune tout le mal qu’elle pensait du débat actuel sur la « compétitivité ».
 
Mais comme dans les vrais séminaires d’entreprises, c’est surtout lors des pauses cafés et déjeuners, que les langues se sont déliées. Et à l’évidence, ce congrès de remotivation plus tourné vers les socialistes que vers les Français, « nombriliste » même, selon les termes d’une députée, n’a pas réussi à chasser la déprime ambiante. Car le plus dur est à venir. Le droit de vote des étrangers, voilà qui inquiète sérieusement les proches d’Hollande. Tout comme le « mariage pour tous ». Les parlementaires le savent, eux qui reçoivent des tombereaux de mails et de courriers. Ces sujets divisent les Français. Et ces questions-là, Hollande ne pourra pas les fuir. Ni lors de sa première conférence de presse prévue courant novembre, ni même lors du congrès des maires auquel il doit se rendre.

Sans parler de l’emploi et de la ligne tracée par le chef de l’Etat. « On en chie deux ans puis on redistribue, c’est un récit difficile à croire », analyse un élu déçu d’avoir vu la « grande réforme fiscale » promise passée à la trappe : « Nous avons complètement perdu la bataille sur la réforme fiscale. Tous les Français ont le sentiment d’être touchés, même ceux qui ne sont pas concernés. On affiche dans cette histoire aucun gagnant ! », se désole-t-il. « Avec le mariage pour tous, on amenait une belle mesure d’égalité et l’on trouve le moyen de déplacer le débat sur la procréation médicale assistée », se lamente un autre parlementaire. « Tout ce qui marche bien, on est infoutu de le faire savoir, poursuit une élue. La taxation sur les transactions financières, le fait que nous ayons décroché un accord avec les partenaires sociaux sur les contrats de générations. On n’en dit rien ! Il n’y a pas de séquences et pas de grands discours ». En somme être « fiers », c’est bien, mais faire savoir pourquoi, ce serait mieux. Charge peut-être à Harlem Désir, désormais à la tête d’un PS aussi déprimé que l’est le pays, de jouer ce rôle…
 

Source : Marianne.net

 


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