Le gouvernement prévoit des débats sans vote fin avril, à l’Assemblée nationale et au Sénat, sur le projet d’application "StopCovid", alors que de nombreuses questions restent en suspens.
Le gouvernement avance sur l’élaboration d’une application mobile qui permettrait de retracer les contaminations au coronavirus. Cet outil, baptisé « StopCovid », enregistrerait les données des téléphones croisés via la technologie Bluetooth et avertirait un utilisateur s’il a été en contact avec une personne atteinte du Covid-19. Preuve que l’exécutif semble bel et bien décidé à mettre en place ce dispositif, un débat sur le sujet est prévu à l’Assemblée nationale le 28 avril, puis au Sénat le 29. Mais un débat sans vote, possibilité offerte au gouvernement par l’article 50-1 de la Constitution.
Pas d'obligation, donc pas de loi
Un ministre justifie : « A ce stade, ce n’est pas du domaine de la loi puisque ce serait sur une base volontaire... si ça se fait. » Autrement dit, puisque ce dispositif n’est pas coercitif, il n’aurait pas à figurer dans un texte voté en bonne et due forme par le Parlement.
Un choix qui fait tiquer jusque dans la majorité présidentielle. « Un Parlement qui ne décide pas, c’est un sujet », grince un député influent de La République en marche, dont une partie de l’aile gauche s’opposait déjà à une telle application, en s’inquiétant pour les libertés publiques. A droite, on grimace aussi. « Le Parlement doit pouvoir donner son avis sur un sujet qui touche aux libertés publiques. Nous voulions absolument un débat et nous l’avons obtenu, même si nous aurions préféré qu’il soit accompagné d’un vote », indique Damien Abad, le président du groupe LR à l’Assemblée nationale.
"La priorité, c'est la généralisation des tests et des masques."
A vrai dire, les oppositions s’interrogent surtout sur la pertinence d’un tel outil. « L’efficacité du dispositif reste à démontrer. Est-ce que le jeu en vaut la chandelle ? reprend Damien Abad. Dans tous les cas, ça ne peut être qu’un outil complémentaire. La priorité, c’est la généralisation des tests et des masques. » Le patron des sénateurs socialistes, Patrick Kanner, renchérit : « Si ça peut aider quelqu’un à se protéger, pourquoi pas. Mais je doute de l’efficacité si c’est du volontariat. »
De fait, il faudrait qu’une masse critique de personnes utilisent l’application pour qu’elle serve réellement à combattre l’épidémie, a pointé ce mercredi, lors d’une audition au Sénat, la présidente de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), Marie-Laure Denis. « Il faut se garder de penser qu'une application va tout résoudre », a-t-elle averti.
Brouillard
D’autres questions planent. L’une est technique : le Bluetooth, qui ne permet pas de mesurer exactement la distance entre deux téléphones, ne va-t-il pas ratisser trop large et semer la confusion ? Une autre touche à la souveraineté numérique : la mystérieuse « plateforme de suivi des contacts » annoncée par Apple et Google sera-t-elle mise à contribution, alors que le gouvernement n’a pas rejeté l’offre de service des deux géants américains ?
Surtout, quand l’application sera-t-elle techniquement disponible ? « L’objectif, c’est le 11 mai », se borne à indiquer Cédric O, le secrétaire d’Etat chargé du numérique. Qui a admis lors d’une audition sénatoriale, mardi, que l’outil ne serait sans doute pas prêt avant le débat prévu au Parlement : « Il est probable que l'on avance parallèlement sur la discussion parlementaire et sur la discussion technique. » Embûche supplémentaire : si elle est saisie par le gouvernement, la Cnil n’aura que peu de temps pour rendre un avis définitif d’ici la fin avril. Autrement dit, députés et sénateurs risquent de débattre dans un sacré brouillard.
Source : Marianne.net
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