Ukraine-Russie : Kiev refuse l'augmentation des prix et relance le spectre d'une « guerre du gaz… »

Pendant que les État-Unis ferment leur McDo en Crimée, la Russie, elle, déclenche une guerre autrement plus dommageable que l'indigestion causée par des hamburgers infects... !

Isabelle (Conscience du peuple)

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INTERNATIONAL - L'Ukraine et la Russie relancent le spectre d'une "guerre du gaz" qui affecterait toute l'Europe. La première a rejeté samedi 5 avril une hausse de 80% des prix du gaz imposée par la seconde et menacé de traîner Moscou devant une cour d'arbitrage. "La Russie a échoué à s'emparer de l'Ukraine par l'agression armée. Elle lance maintenant le plan pour s'emparer de l'Ukraine par l'agression gazière et économique", a tonné le Premier ministre ukrainien, Arseni Iatseniouk, lors d'un conseil des ministres.

Moscou a annulé cette semaine coup sur coup deux ristournes accordées à l'Ukraine sur ses livraisons gazières, dont Kiev est très dépendant. En 72 heures le prix en est ainsi passé de 268 à 485 dollars les 1000 mètres cube (environ 194 et 351 euros), un des plus élevés en Europe. Avant 2006, l'Ukraine payait 50 dollars pour 1000 m3 de gaz russe... "La pression politique est inacceptable. Et nous n'acceptons pas le prix de 500 dollars", a poursuivi Arseni Iatseniouk, disant s'attendre "à ce que la Russie restreigne ou stoppe les livraisons de gaz" à l'Ukraine.

Les précédents en 2005/6 et 2009/10

A cette hausse soudaine des prix s'ajoute une dette que les Ukrainiens n'ont pas vu venir. Le président de Gazprom, Alexeï Miller, a affirmé samedi que l'Ukraine devrait rembourser 11,4 milliards de dollars correspondant à des ristournes en vigueur ces quatre dernières années et qui viennent d'être annulées. Ces prix avantageux étaient prévus par l'accord de Kharkiv, signé en avril 2010, prolongeant jusqu'en 2017 l'utilisation par la marine russe d'une base militaire à Sébastopol, en Crimée. En échange de cette base russe sur son territoire, l'Ukraine de Viktor Ianoukovitch avait obtenu d'importantes remises sur le prix du gaz. Gazprom a par ailleurs annoncé qu'il comptait se faire payer immédiatement les 2,2 milliards correspondant aux livraisons récentes.

À deux reprises, en 2005/6 et 2009/10, Moscou a déjà coupé le robinet de gaz lors de conflits avec l'Ukraine, et par la même occasion le flux d'exportation vers l'Europe, encore très dépendante de la Russie en la matière. En 2008/09, Moscou exigeait déjà le remboursement d'une dette évaluée à 2,4 milliards de dollars. L'Ukraine estimait avoir payé une partie de sa dette et refusait de verser plus d'argent. Gazprom avait alors interrompu ses livraisons avant de les rétablir une semaine plus tard à la demande de l'Union européenne.

Gazprom, le géant gazier russe souvent accusé d'être un bras armé du Kremlin, fournit environ un tiers des approvisionnements de l'Union européenne, qui a une fois de plu,s à l'occasion de l'actuelle crise, affiché son intention de réduire cette dépendance. Près de 40% de ce gaz transite via l'Ukraine.

Gazprom a construit, en collaboration avec les compagnies allemandes E.ON et BASF et du Français GDF Suez, un double pipeline géant dans la mer Baltique. Baptisé Nord Stream, ce dispositif permet de drainer 55 milliards de mètres cube chaque année, directement de la Russie vers l'Allemagne. Même si cette dernière est aussi très dépendante du gaz russe (35%), elle n'est pas une cliente que Gazprom peut priver en énergie... Le Nord Stream est d'ailleurs dirigé par un consortium avec à sa tête Gerhard Schröder, l'ancien Chancelier (1999-2005).

Au sud, Gazprom verra prochainement entrer en fonction le South Stream, qui sera chargé de passer par la Bulgarie, Serbie, Hongrie, Italie. De quoi assurer un transit permanent vers l'Europe centrale. Du coup, les voisins de l'Ukraine ne risquent pas de manquer de gaz en hiver... Selon Alexandre Razouvaev, directeur du département analytique de la compagnie Alpari, "Gazprom est aujourd’hui bien moins dépendant du transit ukrainien que par le passé. Ces quelques dernières années plusieurs itinéraires alternatifs ont été créés: c’est l’acquisition de BelTransGaz, c’est-à-dire le transit par la Biélorussie. C’est aussi Nord Stream. Il ne faut pas non plus oublier le gazoduc qui relie la Russie à la Turquie par la mer Noire".

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Arseni Iatseniouk a évoqué la possibilité de négociations avec des partenaires européens -Slovaquie, Pologne, Hongrie- pour qu'ils rétrocèdent à l'Ukraine une partie du gaz qu'ils reçoivent à des prix inférieurs à ceux désormais facturés à Kiev. Mais la Russie risque de ne pas apprécier un tel arrangement. Le patron de Gazprom a d'ailleurs averti vendredi à la télé russe les pays tentés de faire "très très attention à la légalité" d'une telle décision. "Nous ne pouvons pas pour le moment renoncer complètement aux livraisons russes", a concédé le ministre ukrainien de l'Energie Iouri Prodan.

A l'issue d'une réunion informelle à Athènes des ministres des Affaires étrangères de l'UE, la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton a de nouveau appelé Moscou à "s'engager dans la désescalade" en Ukraine et a réaffirmé que l'Europe était prête à imposer de "nouvelles sanctions", notamment d'ordre économique, si la crise s'aggravait. Plusieurs ministres présents ont mis en garde Moscou sur le risque d'un effondrement économique ou politique de l'Ukraine, alors que la Banque mondiale vient de réviser ses prévisions sur l'Ukraine, prévoyant une récession de 3% pour 2014. L'agence Moody's a de son son côté à nouveau abaissé la note de solvabilité de Kiev, ramenée dans la catégorie spéculative.

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Les deux voisins ex-soviétiques sont en pleine crise depuis le renversement du régime pro-russe de Viktor Ianoukovitch par des manifestants pro-européens fin février.

La Russie s'est emparée en mars de la péninsule ukrainienne de Crimée, après un référendum que Kiev et les Occidentaux ne reconnaissent pas, parlant d'"annexion", et a massé des dizaines de milliers de soldats aux frontières de l'Ukraine, la pire crise Est-Ouest depuis la fin de la guerre froide.

 

Source(s) : Huffingtonpost.fr via Conscience-du-peuple

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