VIDÉO. Précarité, stress, isolement..., le site américain The Verge publie une enquête accablante sur le quotidien des modérateurs de Facebook aux États-Unis.
C'est l'une des nombreuses entreprises à qui Facebook a délégué sa modération. Son nom ? Cognizant. Elle emploie plusieurs milliers de contractuels pour contrôler chaque jour les contenus du réseau social aux 2,3 milliards d'utilisateurs. Dans une vaste enquête menée auprès d'une douzaine de collaborateurs, le site spécialisé The Verge détaille à quel point les recrues finissent traumatisées par l'expérience. Contrat précaire, isolement, travail surveillé, exposition continue à du contenu choquant laissent les salariés dans un piteux état. « On les incite à ne pas discuter du poids émotionnel que leur travail leur impose, même avec leurs proches », explique notamment le journaliste.
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Les 1000 contractuels employés dans le centre de Phoenix (Arizona) disposent d'une formation de quatre semaines au bout de laquelle ils ne sont pas sûrs d'être embauchés. Leur salaire ? 28.800 dollars par an, quand les salariés de la maison mère de Facebook tournent autour de 240.000 dollars annuellement. Dans son enquête, The Verge raconte la pression mise sur l'ensemble des modérateurs qui contrôlent chaque jour 8000 messages, photos, vidéos diffusés sur le réseau social. Résultat, un salarié explique passer environ 30 secondes par post pour atteindre 400 traitements par jour. The Verge raconte comment la politique de Facebook en termes de liberté d'expression s'avère parfois contradictoire, ce qui place les modérateurs dans des situations aberrantes. Ainsi, un message comme « Les personnes autistes devraient être stérilisées » ne sera pas retiré, alors que « Je déteste tous les hommes » viole la politique du site. Et attention aux erreurs d'appréciation : les modérateurs qui prennent trop de « mauvaises décisions » risquent le licenciement.
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Sexe, drogue et conspirationnisme
En plus de la difficulté du travail, les salariés sont entravés pendant leur temps libre : une heure de pause divisée en trois tranches et une pause de neuf minutes consacrée au « bien-être »... qu'il ne faut pas utiliser pour aller aux toilettes ni pour prier. Cocasse quand on apprend que des centaines d'employés hommes se partagent un urinoir et deux toilettes.
Face à cette pression constante et aux atrocités publiées sur Facebook, certains salariés finissent à bout de nerfs. Ainsi, The Verge révèle comment des modérateurs de Cognizant ont été retrouvés en pleine relation sexuelle dans les cages d'escalier, le garage, et même la salle d'allaitement réservée aux mères. D'autres racontent fumer régulièrement du cannabis pour décompresser, y compris pendant le travail. Enfin, la plupart s'adonnent à la pratique de l'humour noir pour extérioriser leur mal-être, quitte à enchaîner les blagues racistes ou sexistes ou les allusions au suicide.
The Trauma Floor: The secret lives of Facebook moderators in America https://t.co/d1JzzBN5YK by @caseynewton pic.twitter.com/vaFSMkI3oc
— The Verge (@verge) 25 février 2019
Devant la prolifération des théories conspirationnistes en ligne, plusieurs contractuels ont avoué douter de plus en plus des versions officielles. Un salarié se balade dans le bâtiment en expliquant que la Terre est plate. Un ancien raconte qu'il a commencé à se poser des questions sur certains aspects de l'Holocauste. Un autre, qui dort avec une arme à feu, a déclaré que l'attentat du 11 septembre 2001 n'était sûrement pas une attaque terroriste.
L'anxiété qui règne dans l'entreprise ne laisse pas les anciens modérateurs indemnes. Plusieurs racontent souffrir de syndromes de stress post-traumatique et de crises d'angoisse en public : « Je ne pense pas qu'il soit possible de faire ce travail et de ne pas en sortir avec un trouble de stress aigu », explique un employé.
Face au scandale, Facebook réagit
À la suite de la publication de l'enquête, Facebook a réagi via son vice-président des opérations mondiales, Justin Osofsky. La firme américaine a expliqué qu'elle allait désormais mettre en place des « contrats clairs » avec ses sous-traitants, qui exigeront des suivis psychologiques, des examens réguliers sur leurs performances et des visites régulières dans leurs locaux.
Source : Le Point.fr
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