Pollution des véhicules diesel : « Un problème comparable à celui de l’amiante »

Votre voisin serait-il un tueur en série ? Pour ma part, j'étais intimement convaincu de la nocivité des gaz d'échappements des diesel depuis toujours. C'est pour cela que j'ai toujours regardé ces véhicules avec un certain a priori. Mais pour nombre d'entre nous, même s'ils avaient conscience du danger, c'est encore le facteur économique qui leur a servi d'alibi. Alors qu'en sera-t-il maintenant si l'information fait son chemin ? Dans ce domaine, comme ailleurs, l'hypocrisie est reine... Et il ne tient qu'à vous que les choses changent...

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Europe Qualité Expertise est l’un des grands réseaux d’experts automobiles français. C’est un des principaux interlocuteurs des pouvoirs publics sur les grands dossiers du transport ces dernières années, et notamment du diesel.

Les particules fines émises par les moteurs Diesel sont responsables de 42000 morts par an en . Depuis quand connaît-on le danger des particules fines ?

BRUNO GUIBEAUD. Depuis toujours ! Les constructeurs et les pouvoirs publics connaissaient dès le début du diesel, dans les années 1960, le danger des particules fines.

Un simple torchon sur le pot d’échappement et l’on récolte des suies que l’on n’a pas avec un moteur essence. Mais à l’époque, les intérêts de l’Etat étaient plus importants que la publique et l’écologie n’existait pas… Le lobby du diesel a toujours été très puissant car il s’agit d’une technologie parfaitement maîtrisée par les Français. Quand on a une longueur d’avance, on n’a aucun intérêt à perdre son avantage compétitif…

Les constructeurs mettent en avant que le pot catalytique et le filtre à particules permettent de réduire les émissions de particules fines. Ces dispositifs sont-ils efficaces ?

Ce qui est vrai, c’est qu’en vingt ans, les moteurs Diesel sont passés de l’âge de pierre à la haute technologie et polluent un peu moins. Sauf qu’entre-temps, le parc a été multiplié par cinq et que les deux parades aux particules fines, le pot catalytique et le filtre à particules, présentent chacune de grosses faiblesses.

Quelles sont ces faiblesses ?

Le filtre à particules ne s’attaque qu’aux particules sans faire de chimie fine. Or le diesel émet aussi des oxydes d’azote (NOx) très dangereux pour les bronches. Le pot catalytique, lui, ne fonctionne qu’à partir d’une certaine température… que les voitures n’atteignent pour ainsi dire jamais en ville. Résultat, les moteurs Diesel s’encrassent et émettent encore davantage de particules fines.

Peut-on parler d’un véritable problème de santé publique comparable à celui de l’amiante ?

Oui, car nous n’avons pas trouvé de solution et une partie des dispositifs antipollution mis en place ne font qu’accentuer le problème. La pollution est moins visible qu’autrefois, quand le diesel fumait noir, mais les particules fines et les gaz NOx sont toujours là et tuent tous les jours. Le diesel en ville aujourd’hui est une gigantesque bombe à retardement. Ceux qui roulent peu, moins de 10.000 km par an, et ils sont nombreux, ne devraient jamais rouler avec un diesel. C’est criminel.

Les zones d’actions prioritaires pour l’air (Zapa), en interdisant les véhicules polluants à l’intérieur de certaines villes, peuvent-elles permettre de résoudre le problème ?

Les Zapa ne résoudront rien du tout. Elles ne feront qu’ajouter un clivage de plus entre les gens qui ont de l’argent — et une voiture récente — et ceux qui n’en ont pas. Côté pollution, un diesel récent au moteur encrassé pollue autant qu’un vieux. Dans notre réseau, nous voyons chaque année des milliers de ces véhicules au moteur encrassé et c’est de pire en pire. On dit que le diesel « souffre en silence », ça ne se voit pas, ça ne s’entend pas, mais ça pollue terriblement !

Source : Le Parisien