Blanc et Joyandet démissionnent, victimes des "affaires"

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Tel un pilote de Harrier Nicolas Sarkozy lâche deux personnages peu recommandables, en guise de leurre à la face du peuple, mais est-ce que cela suffira à éradiquer le légitime courroux provoqué par l’affaire Woerth ?

par Yves Clarisse et Emmanuel Jarry

PARIS (Reuters) - Nicolas Sarkozy a sacrifié dimanche deux ministres épinglés pour leur utilisation des deniers publics dans l'espoir d'alléger la pression sur le responsable de la réforme des retraites, Eric Woerth.

La présidence de la République a annoncé le départ du secrétaire d'Etat à la Coopération Alain Joyandet et de son homologue chargé du développement de la région capitale Christian Blanc dans un climat empoisonné par les "affaires".

"Les secrétaires d'Etat Alain Joyandet et Christian Blanc ont présenté leur démission du gouvernement", peut-on y lire. "Le Président de la République et le Premier ministre ont accepté ces démissions."

Leurs fonctions seront respectivement exercées par le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner et le ministre chargé de l'Espace rural Michel Mercier.

A l'Elysée, on souligne que la décision a été prise dimanche par Nicolas Sarkozy et son Premier ministre François Fillon afin de "sanctionner des comportements jugés inadmissibles".

Nicolas Sarkozy avait déclaré mercredi devant les députés de l'UMP qu'il tirerait les leçons des comportements de certains ministres lors d'un remaniement à l'automne et, selon des parlementaires, les jours des deux sortants étaient comptés.

"Certains comportements ministériels ne m'ont pas plu du tout. J'en tirerai les conséquences sévèrement au moment que j'aurai choisi", avait-il dit selon un participant.

Les cigares de Christian Blanc payés sur les deniers publics et la location d'un jet privé par Alain Joyandet étaient clairement dans le collimateur du président français.

Le Premier ministre François Fillon avait enfoncé le clou en critiquant, sans les nommer, les ministres fautifs lorsqu'il a annoncé toute une série de mesure de réduction du train de vie de l'Etat en période de crise.

WOERTH DANS LA TOURMENTE

Plusieurs ministres sont actuellement au centre d'une tourmente politico-médiatique due à une cascade d'affaires, par exemple sur l'utilisation des logements de fonction, mais c'est le cas d'Eric Woerth qui préoccupe le plus le gouvernement.

L'actuel ministre du Travail est notamment soupçonné de conflit d'intérêts dans son traitement du dossier fiscal de l'héritière de L'Oréal lorsqu'il était chargé du Budget, jusqu'en mars dernier. Liliane Bettencourt est suspectée de fraude fiscale par le biais de comptes en Suisse.

Selon des députés de la majorité, Eric Woerth, artisan de la réforme des retraites auquel Nicolas Sarkozy a réitéré sa confiance à plusieurs reprises, pâtissait du maintien au gouvernement de certains de ses collègues.

La démission de Christian Blanc et d'Alain Joyandet peut donc être vue comme un moyen d'alléger la pression sur le ministre du Travail, ce que dénonce l'opposition.

"Soit la démission des deux ministres est une tentative de l'Elysée de jeter du lest, c'est tardif et pose plus fortement la question d'Eric Woerth, soit ces démissions sont 'spontanées' et c'est l'image d'un délitement qui appelle à un changement de gouvernement", a déclaré dans un communiqué le député socialiste de Paris, Jean-Christophe Cambadélis.

Pour le député Vert Noël Mamère, sur i>Télé, "il s'agit d'un pare-feu pour protéger Eric Woerth".

Mais pour Dominique Paillé, porte-parole adjoint de l'UMP, ces démissions ne sont qu'un épisode mineur.

"Ce type d'épreuve, c'est toujours difficile à supporter mais ça n'empêchera pas le gouvernement de continuer à oeuvrer (...) pour appliquer le programme pour lequel le président Sarkozy a été élu", a-t-il dit sur i>Télé.

COÛTEUX CIGARES

Alain Joyandet avait précédé l'annonce de l'Elysée en annonçant lui-même sa démission sur son blog et, selon son entourage, souffrait de n'être plus soutenu. Il aurait pris sa décision depuis une semaine et en aurait parlé au président.

"Après mûre réflexion, j'ai décidé de quitter le gouvernement", peut-on lire dans ce texte où il affirme que "pas un euro n'a été détourné pour (son) enrichissement personnel".

Il était soupçonné d'avoir bénéficié d'un permis de construire illégal pour agrandir la maison qu'il possède à Grimaud (Var), près de Saint-Tropez. Il avait ensuite annoncé dans un communiqué qu'il renonçait à ce permis.

En mars dernier, Alain Joyandet avait été au centre d'une polémique pour avoir loué un jet privé pour un voyage en Martinique pour la somme de 116.500 euros.

Alain Joyandet s'était défendu en expliquant qu'il devait se rendre à une conférence internationale pour la reconstruction d'Haïti, invoquant des impératifs d'agenda.

Le Canard enchaîné, qui était à l'origine des révélations sur Alain Joyandet, avait aussi dévoilé que des factures d'un total de 12.000 euros avaient été réglées par le Trésor public pour des cigares au nom du cabinet de Christian Blanc.

"Moi, je ne suis pas le genre à faire ça", a déclaré jeudi dernier lors d'un déplacement dans l'Aveyron Nicolas Sarkozy, qui n'avait pas caché sa volonté de trancher dans le vif.

Le secrétaire d'Etat n'avait reconnu qu'une consommation équivalant à 4.500 euros, accusant son chef de cabinet, depuis limogé, d'avoir détourné le reste. Une enquête a été ouverte à la demande de Christian Blanc mais le Premier ministre François Fillon lui avait ordonné de rembourser l'intégralité de la somme sans préjuger des résultats de cette enquête.

Source : Reuters

Informations complémentaires :

le Télégramme.com : Joyandet et Blanc. Deux sacrifiés
Le Parisien.fr : Blanc et Joyandet quittent le gouvernement à la demande de Sarkozy
L'Express : Blanc et Joyandet démissionnent, victimes des "affaires"


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