Bruxelles s'agace des déficits français, Moscovici assure qu'il n'y aura « pas d'exception »

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La perspective d'un déficit public de 4,4 % en France cette année fait l'effet d'un coup de tonnerre à Bruxelles. Après les annonces faites par Michel Sapin, ministre français des finances et des comptes publics, mercredi 10 septembre, la Commission européenne a demandé à la France de présenter des « mesures crédibles » pour réduire son déficit.

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 Le projet de budget, que Paris doit envoyer à la Commission d'ici mi-octobre, « doit clairement spécifier des mesures crédibles pour mettre en place l'ambitieux plan de réduction des dépenses pour 2015 et après », a indiqué Simon O'Connor, le porte-parole de la Commission européenne en charge des Affaires économiques.

Un ton résolument offensif, alors qu'il est désormais clair que la France s'éloigne chaque jour davantage du cap de 3 % de déficit d'ici à la fin de l'année 2015, en dépit du délai de deux ans accordé au printemps 2013, en échange de réformes structurelles. Un constat qui va tendre les relations entre la France et ses partenaires européens, lesquels cachent de moins en moins leur déception à l'égard des performances françaises.

« Les Français ont déjà eu un délai de deux ans, et n'ont pas fait les réformes structurelles espérées depuis ce sursis, s'agace une source bruxelloise. Il en va pourtant de la crédibilité du pacte de stabilité et de croissance. »

LES PROCHAINES SEMAINES S'ANNONCENT TENDUES

En face, Paris entend au contraire plaider les « circonstances exceptionnelles » – croissance atone et déflation rampante – pour obtenir un nouveau sursis. Avec un objectif : ne pas trop serrer la vis, afin de ne pas plonger l'économie dans la récession.

« L'efficacité, ce n'est pas de chercher à atteindre à toute force et coûte que coûte l'objectif de déficit initial, quelles qu'en soient les conséquences sur notre tissu économique », a plaidé Michel Sapin, mercredi matin. « On peut certes parler de circonstances exceptionnelles, mais Hollande et Valls restent très prudents sur les réformes », observe un responsable européen.

Les prochaines semaines s'annoncent tendues entre Bruxelles, et Paris. En principe, à la mi-octobre, le gouvernement doit détailler à la Commission son projet de loi de finances. Jyrki Katainen, commissaire sortant aux affaires économiques et monétaires, devrait ensuite rendre son avis d'ici début novembre.

« IL NE SERA PAS POSSIBLE DE REFUSER UN NOUVEAU DÉLAI » 

Sur le papier, il dispose désormais de la possibilité de demander certains aménagements au gouvernement français, avant même le vote du budget par les députés. Pour parvenir à ses fins, elle pourrait même menacer de sanctions financières, en considérant que le gouvernement français n'a pas pris les mesures nécessaires pour tenir le cap des 3 % en 2015. Une option que personne n'ose brandir, afin de ne pas compliquer davantage la tâche, et les marges de manœuvre politiques de François Hollande.

D'ailleurs, ni José Manuel Barroso, qui achève son mandat le 1er novembre, ni Jean-Claude Juncker, qui commence le sien dans la foulée, ne vont chercher à rompre les ponts avec Paris. « Il ne sera pas possible de refuser un nouveau délai, mais il va falloir trouver un moyen de le vendre aux plus orthodoxes », dit un haut responsable français.

En attendant, le bras de fer va compliquer les premiers pas à Bruxelles du prochain commissaire aux affaires économiques et monétaires, Pierre Moscovici. L'ancien ministre des finances de François Hollande sera attendu au tournant par ses collègues plus orthodoxes et par les dirigeants allemands, qui ont contesté jusqu'au bout son choix à ce portefeuille sensible.

« Quand on vient à la Commission, on n'oublie pas sa nationalité, ses convictions : je suis social-démocrate, je suis fier de l'être mais on devient commissaire européen, défenseur de l'intérêt général européen », a expliqué l'ancien ministre après l'annonce de sa nomination. Il n'y aura « pas de suspension, de dérogation, d'exception pour un pays quelconque », a assuré M. Moscovici, même s'il y a « des possibilités d'interprétation à partir d'un certain nombre de situations, d'efforts ».

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Avant de prendre son poste, le candidat français doit être auditionné d'ici à début octobre par les eurodéputés. Nul doute que la situation de la France sera alors amplement commentée.

 

Philippe Ricard

Journaliste au Monde

 

Source : Lemonde.fr

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