Kirghizstan : escalade de la violence, l'armée tire sur les civils

Les tensions sont vives au Kirghizstan entre Ouzbeks et Kirghiz, et semblent avoir été en partie bassement orchestrées par la famille de Kourmankek Bakïev, qui y voit un moyen de perturber le référendum sur la constitution prévu le 27 juin. Encore une fois c'est le peuple qui trinque... résultat :

Plus de 100 personnes ont été tuées et plus de 1.250 autres blessées lors de violences ethniques dans la région d'Och, dans le sud du pays.

Les violences ethniques se sont étendues dimanche 13 juin à de nouveaux secteurs du sud du Kirghizstan, où plus de 100 personnes ont été tuées et quelque 1.250 autres blessées depuis le début des émeutes jeudi soir à Och, la deuxième ville de ce pays d'Asie centrale. Des milliers d'Ouzbeks ont gagné l'Ouzbékistan voisin, fuyant les violences de bandes de Kirghizs qui ont incendié des villages ouzbeks et s'en sont pris à leurs habitants.

Plus de 75.000 réfugiés sont arrivés en Ouzbékistan, selon un communiqué du ministère ouzbek des Situations d'urgence, cité par l'agence de presse russe RIA Novosti. La plupart sont des personnes âgées, des femmes et des enfants et plusieurs sont blessés par balle, selon le ministère qui a annoncé que plusieurs camps de réfugiés étaient en train d'être montés.

"Bataillon de parachutistes"

Par ailleurs la Russie a envoyé dimanche un bataillon de parachutistes, environ 300 hommes, pour renforcer la sécurité de sa base aérienne au Kirghizistan, selon l'agence russe Interfax. Le Kremlin avait en revanche refusé samedi d'accéder à la requête du gouvernement kirghiz par intérim qui avait demandé à la Russie une aide militaire pour mettre fin aux violences. Les Etats-Unis et la Russie possèdent des bases aériennes au Kirghizistan mais elles sont située dans le Nord, loin des régions concernées.

Dimanche, le bilan officiel s'élevait à au moins 104 morts et 1.231 blessés, selon le ministère de la Santé. Ce dernier précisait que ces chiffres incluaient 21 décès dans le principal hôpital de Jalal-Abad, autre grande ville du Sud, où les violences se sont étendues, mais pas de morts signalées dans d'autres hôpitaux de la région.

Un responsable militaire, Talaaibek Mirzabaïev, a rapporté qu'une trentaine d'Ouzbeks avaient été tués à Souzak, un village de la région de Jalal-Abad. Un autre village ouzbek, Dostouk, a par ailleurs été incendié par des Kirghizs mais le nombre de victimes n'était pas établi.

Des médecins et des militants des droits de l'Homme ont précisé que le bilan pourrait être bien plus lourd, expliquant que des Ouzbeks blessés craignant d'être à nouveau attaqués ne s'étaient pas présentés dans des hôpitaux.

Mobilisation partielle de réservistes

Les incendies allumés par les auteurs de violences ont détruit la majeure partie d'Och, la deuxième ville du pays qui compte 250.000 habitants. Des magasins ont été pillés, privant les habitants d'une grande partie des vivres. Dimanche, des foules de Kirghizs ont pris le contrôle de l'essentiel de la ville où les quelques Ouzbeks encore présents se barricadaient dans leurs quartiers. Des incendies continuaient de faire rage dans la ville, où des tirs occasionnels pouvaient être entendus.

Le gouvernement par intérim a annoncé une mobilisation partielle de réservistes et donné l'ordre aux soldats de tirer sur les émeutiers, sans parvenir à rétablir le calme.

Des tirs ont par ailleurs retenti à Jalal-Abad (à 70km d'Och) où, la veille, une université avait été incendiée, un commissariat assiégé tandis qu'un véhicule blindé et plusieurs armes étaient dérobées dans une unité militaire locale.

Des Kirghizs ont tenté d'attaquer l'hôpital de la ville, mais des Ouzbeks les ont expulsés après plusieurs heures marquées par de violents échanges de tirs, selon des témoins. Un groupe a également tenté de s'emparer du contrôle du siège de la police à Jalal-Abad mais a été repoussé.

Embuscade

D'après Talaaibek Myrzabaïev, des Ouzbeks ont tendu une embuscade à une centaine de Kirghizs dimanche sur une route près de Jalal-Abad et les ont pris en otages. Des véhicules circulant sur la principale route près de Jalal-Abad ont essuyé à plusieurs reprises des coups de feu.

Dans le village voisin de Bazar-Kourgan, une foule d'environ 400 Ouzbeks ont renversé des véhicules et tué un capitaine de police, selon un militant politique local, Asil Tekebaïev. Des habitants ont rapporté que des Kirghizs affluaient de toute la région dans le village, armés de bâtons, de barres métalliques ou même de fourches.

Si les Ouzbeks représentent environ 15% de la population du Kirghizistan, ils rivalisent en nombre avec les Kirghizs dans les régions d'Och et de Jalal-Abad.

Il s'agit des pires violences depuis le soulèvement sanglant qui a provoqué le départ en avril dernier de l'ancien président Kourmankek Bakïev, arrivé au pouvoir en 2005 après des manifestations de rue.

L'ancien président de la région accusé

La présidente par intérim Roza Otounbaïeva a accusé la famille de Kourmankek Bakïev d'être à l'origine des troubles à Och, y voyant une tentative de perturber le référendum sur la Constitution prévu le 27 juin. Le maire par intérim de Jalal-Abad, Maksat Jeinbekov, interrogé par téléphone, a déclaré que des partisans de l'ancien président dans sa région avaient déclenché les émeutes en s'en prenant à la fois à des Ouzbeks et des Kirghizs.

Du Bélarus où il s'est exilé, Bourmanbek Bakiev a diffusé un communiqué démentant tout rôle dans les violences et reprochant aux autorités par intérim de ne pas réussir à protéger la population. 


(Nouvelobs.com, av AP)


Source : Le NouvelObs

Informations complémentaires :

Le Point.fr : Les affrontements font près de 100 morts au Kirghizistan
Euronews (video) : Kirghizstan : la minorité ouzbèke dénonce un génocide
Le Parisien : Violences au Kirghizistan : 104 morts et plus de 100 000 réfugiés


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