Les prédateurs se portent bien. Selon une étude de l’OCDE publiée mercredi, les 1% les plus riches continuent de s’approprier une part toujours plus importante des revenus, notamment dans les pays anglo-saxons.

Travaillant sur les données compilées, entre autres, par l’économiste Thomas Piketty, l’Organisation de coopération et de développement économiques souligne ainsi que «les 1% de la population aux revenus les plus élevés ont capté une part disproportionnée de la progression globale des revenus» ces trente dernières années. Jusqu’à 37% au Canada, et surtout 47% aux Etats-Unis…

Résultat : les plus aisés accaparent aujourd’hui, outre-Atlantique, 19,3% de l’ensemble des revenus (avant impôts) contre 8,2% il y a trente ans. Viennent ensuite la Grande-Bretagne, où les 1% les plus riches concentrent 12,9% des revenus (contre 6,7% en 1980), l’Allemagne (12,7% en 2012, 10,7% en 1981), et le Canada (12,2% en 2012, 8,1% en 1981). Même les pays scandinaves voient leur tradition redistributive mise à mal. En Norvège, Suède et Finlande, la part des revenus des plus aisés est ainsi passée de près de 4% il y a trente ans à plus de 7% aujourd’hui. La France, de son côté, reste sage, avec 8,1% de l’ensemble des revenus concentrés entre les mains des plus riches en 2012, contre 7,6% il y a trente ans.

Fondre. Parmi les pistes avancées par l’OCDE pour expliquer cette évolution : la mondialisation de l’économie, qui a créé un marché des élites s’arrachant à prix d’or, surtout dans le monde anglo-saxon, mais aussi la financiarisation, qui a profité à une poignée de la population. Plus largement, «les disparités de revenus au sein des entreprises, notamment en faveur du top management, sont beaucoup plus acceptées aujourd’hui qu’elles ne l’étaient il y a trente ans», avance Michael Foster, économiste auteur de l’étude.

Autre élément : la fiscalité. Certes, ces données concernent les revenus avant impôts. Mais si en aval, la part prélevée diminue, certains, et notamment les très hauts revenus, ont pu se constituer d’autant plus facilement des patrimoines, qui ont produit des revenus plus élevés encore. C’est l’effet boule de neige. Or, la fiscalité concernant cette population n’a cessé justement de fondre ces trente dernières années. Au sein des pays de l’OCDE, le taux marginal moyen d’imposition sur le revenu est ainsi passé de 66% en 1981 à 43% en 2013. Pour ne rien arranger, sur la même période, le taux moyen légal de l’impôt sur les bénéfices a chuté de 47% à 25%, et les impôts sur les dividendes a fondu de 75% à 42%.

Libérale. Et l’OCDE de réclamer, du coup, une plus forte fiscalité… «Sans une action concertée des pouvoirs publics, l’écart entre riches et pauvres devrait continuer de se creuser au cours des prochaines années», explique ainsi José Angel Gurría, secrétaire général de l’organisation. L’OCDE, plutôt libérale, ne va quand même pas jusqu’à réclamer une hausse du taux marginal. Mais elle préconise une réduction des niches fiscales et une meilleure imposition des revenus du capital et des successions..

 

Luc PEILLON

 

Source : Liberation.fr

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